Defeater - Travels

Chronique CD album (32:14)

chronique Defeater - Travels

On ne nous parle que de New-York quand le mot Hardcore est prononcé. Ces tought-guy, marcels casquettes, mosh-part et autres beat-down et cet esprit de famille, limite « gangsta du rock » ou plutôt enfants de la muscu du punk. N’oublions pas que la scène de Boston, Massachussetts a vu naitre son pendant moderne (et souvent straight-edge). Mais l’accouchement s’est fait dans la douleur, et elle a également subit de lourdes pertes. Si les Have Heart, Modern Life Is War, Verse ne sont plus, ils laissent derrière eux des survivants éblouissants, que sont les increvables Converge, Bane, et ceux qui nous intéressent plus particulièrement ici : Defeater. Unanimement acclamé, le groupe se taille une solide réputation sur scène (là où pour ma part je les ai découvert, et où j’ai prit une sacré claque) et nous offre avec ce Travels, un voyage palpitant à travers un hardcore mélodique porté à son apogée.

Soulignons en passant l’effort porté sur l’artwork de ce disque, illustrant de photos le périple (d’où le titre) de plusieurs protagonistes au travers d’histoires, où la mélancolie se mêle au drame d’une violence urbaine poisseuse et sombre. Si la couleur semble donné d’emblée, c’est sans compter sur une belle palette d’émotions que va dévoiler le groupe au fur et à mesure de ce disque.

J’ai réalisé il y à peu, que la musique que j’écoute en général est relativement abstraite, car, déshumanisé au niveau vocal et portée essentiellement sur l’instrument et la matière sonore en tant qu’élément prédominant à une certaine mimesis (à l’instar de certains compositeurs classiques qui cherchaient à imiter la nature). Je me suis donc retrouvé devant une absence totale de repères au réel, d’émotions à proprement parlé, d’effet cathartique à l’écoute de la plupart de mes groupes fétiches. Le tour de force de Defeater - et je pense que cette caractéristique est intrinsèque au genre - c’est de nous plonger littéralement dans la vie, la ville, ses tribulations et ses insatiables cataclysmes émotionnels ; sans tomber dans le pathos mais juste dans une représentation, dans une expression d’une vitalité que la dynamique des compos et l’honnêteté de la mise en forme mettent à nue. A la manière d’un road-movie intérieur, on ressent à l’écoute de ce disque la solitude des protagonistes face à la densité humaine, au mouvement, à l’agitation et aux flux d’histoires qui se croisent dans une architecture urbaine froide et oppressante. Ce disque nous offre la contemplation d’un monde dans lequel les choses vont trop vite pour nous, dans lequel notre empreinte n’est souvent laissé que dans la poussière, la crasse et le sang. Mais la solitude présentée ici ne se traduit pas comme l’immobilité, la déchéance ou l’abandon, mais comme un processus, une prise de conscience de soi même, une lueur d’espoir qui perce à travers les building des quartiers d’affaires et les bouches d’égouts des downtown malfamés. Si bien qu’à la fin de l’album nous sommes arrachés à un univers dans lequel chacun de nous peut se projeter, grâce aux références d’émotions et d’énergies que le groupe convoque tout au long de celui ci. On sent ainsi tout les pores de ce disques suinter cette atmosphère urbaine, un Boston que l’on imagine humide et pesant, communautaire et violent, où les « celtics » immigrés ont autrefois posés leurs valises pour y reconstruire leur vie. Ce Travels fait ainsi office de renouveau, un moment au travers duquel on ressort meilleur, ou du moins enclin à prendre les devants, à dégainer les premiers, à sortir la tête de l’eau.

Ainsi, trempés jusqu’aux os, nous ressentons chaque goutte d’eau perler à la pointe de nos mèches de cheveux et tomber lourdement sur le sol. Assoiffés de vie à la fin du périple, malgré la tempête que nous venons d’essuyer, l’accalmie est passée et ce tourbillon d’émotions va pouvoir sécher au rayon de soleil qui dessine en contre jour les silhouettes sombres d’une ville dans laquelle nous cherchons encore notre place. La route est longue, mais c’est la tête haute que nous chercherons. « no place, no place for me. »

photo de Viking Jazz
le 24/01/2011

6 COMMENTAIRES

Pidji

Pidji le 24/01/2011 à 09:52:54

Etrange, j'aime bcp ce style, mais je n'arrive pas à accrocher à ce disque. Va comprendre.

Kurton

Kurton le 24/01/2011 à 17:10:14

Bon groupe!

Geoff Fatbastard

Geoff Fatbastard le 24/01/2011 à 21:01:37

Un des meilleurs skeuds en HxC de 2008... Grosse trempe, du style et discours qui file l'envie d'en découdre...

Sam

Sam le 25/01/2011 à 07:11:05

et je préfère même "Lost ground" EP (2009), incroyable ce disque!!!

vkng jzz

vkng jzz le 25/01/2011 à 09:45:03

c'est vrai que l'EP qui suit est également particulièrement réussi ! il fonctionne un peu en diptyque d'ailleurs. d'autant plus appréciable.

JiBrest

JiBrest le 28/01/2011 à 17:45:16

Je lui préfère également l'EP de 2009, même si celui ci est énorme aussi. Et comme le souligne Vkng Jzz, le fait que les deux disques se rejoignent rend la chose encore plus intéressante !

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