Demiurg - Slakthus Gamleby

Chronique CD album (39:17)

chronique Demiurg - Slakthus Gamleby

Alors que la marée noire du revival thrash à patches commence tout juste à se résorber, laissant juste quelques galettes éparses s’échouer encore ci et là sur les blanches plages de St Bleuargl-sur-Mer, c’est à présent au tour de la vague du fétichisme "old school Swedish death metal" de venir mettre cul par dessus tête les parasols et strings ensablés de nos belles contrées. Et ce retour en force dans les marécages fangeux de la bonne vieille époque des 4 mousquetaires Entombed, Dismember, Unleashed et Grave est franchement rafraîchissante (déodorant Sunlight: moi je suis en friche, et ça se voit!). Sauf que les skeuds du genre commençant à s’empiler en des proportions aussi impressionnantes que les monceaux de vieilles capotes jonchant les alentours de la piscine des Berlusconi, l’écœurement commence doucement mais sûrement à poindre.

 

Alors pourquoi échangerions-nous nos 2 barils de Entrails, Mr. Death, Puteraeon ou Crucyfire contre ce 3e album de Demiurg? D’autant qu’il semble bien que ce groupe soit la Nième émanation du stakhanoviste Rogga Johansson – l’homme au CV d'enfer (Edge of Sanity, Deranged) et aux 666 projets (Paganizer, Ribspreader, Putrevore) – qui est à l’origine à lui tout seul d’un bon tiers des sorties actuelles du genre. Alors, j’attends …? Eh bien:

  1. parce que l’homme s’est entouré d’une bande de vieux briscards qui maitrisent leur art sur le bout du manche, nous épargnant ainsi les éjaculations précoces des jeunes loups à l'enthousiasme mal canalisé. Vous trouverez en effet dans le cockpit Dan Swanö, le Devin Schuldiner de Stockholm, producteur brillant, acteur majeur du retour en force du style avec Bloodbath, et surtout âme d’Edge of Sanity et d’une multitude d'autres projets. Et l'autre copilote se nomme Ed Warby, batteur en poste au sein d’Hail of Bullets et Gorfest entre autres.

  2. parce que pour une fois, Rogga a laissé ses collègues s’exprimer, ce qui augure du meilleur quand on connait l’aptitude de Mr Swanö à composer de vraies petites bombinettes.

  3. parce que, contrairement à 99% des combos de cette mouvance, au lieu de rester agrippé au répertoire des 4 ancêtres précédemment cités, des Nihilist et autres Carnage, Demiurg préfère invoquer l’esprit de Edge of Sanity période The Spectral Sorrow / Purgatory Afterglow, ainsi que de tous ces précurseurs – Godgory, Orphanage, … – qui contrebalançaient les effluves putrides de leurs racines boueuses à coups de mélodies et d’atmosphères délicates.

 

Et en effet, sur les 8 titres de Slakthus Gamleby (« l'abattoir de Gamleby » pour ceux qui auraient perdu leur méthode Assimil Baguette-Krisprolls), l’auditeur est exposé à ce bon vieux death baveux mais pas crado, bourbeux mais mélodique, nerveux mais pas épileptique, qui réveille l'adolescent acnéïque qui dort en nous (pas vrai les croulants?!).  On distingue sans mal la « touche Rogga », ce classicisme de bon goût, cette gorge ultra-caverneuse, ces schémas simples mais efficaces, ces tempos guerriers mais « joyeux » à la Unleashed. Et en parallèle on retrouve les ralentissements majestueux de Dan, cette lead fantomatique et poignante – sirène envoûtante émergeant régulièrement des brumes tapissant le fond de l’espace sonore –, ces quelques menues expérimentations ainsi que ce clavier qui habille discrètement mais sûrement les passages parfois un brin trop bourrus de l’ami Rogga. On a de plus le droit à un chant féminin quelque peu incongru, cheveu sur la soupe qui trouve quand même sa place dans la marmite de M. Johansson grâce au trait d’union Dan Swanö. Bref, Slakthus Gamleby est un imposant grizzli capable de montrer des crocs gros comme ça, mais également doté d’un petit cœur de gothounette romantique et attifé d’une chemise à pois vert et orange, touche d’originalité apportée par ces sonorités kitsch (le synthé à 1:01 sur « Cold Skin »), ces effets électro (le petit côté Illdisposed moderne sur «Slakthus Gamleby ») et ces grattes psychés (le solo, toujours sur «Slakthus Gamleby ») qui font invariablement se redresser sourcils et oreilles assoupies. Un peu bizarre certes, un peu hétérogène parfois, mais ne comptez pas sur moi pour critiquer une telle manifestation d’originalité.

 

Si les chaleureux échos réminiscents du Edge of Sanity de la grande époque et le growl profond de Rogga nous réchauffent efficacement le palpitant, on regrette quand même parfois que l’album ne décolle pas du « Mouaif » (la bisounours song « From Laughter To Retching »), du « Bien sympa » ou au mieux du « Carrément bon » (« Death Grasp Oblivion », virulent et mélodique). Bref, pas vraiment de gros craquage de slip nucléaire qui aurait permis au groupe de rejoindre Bloodbath et Death Breath au rang des gardiens de la mouvance néo-old-school-death from Sweden, mais néanmoins du matos de très bonne qualité.

 

Pour résumer: si vous êtes nostalgiques de la grandeur des Purgatory Afterglow et autre Crimson, procurez-vous sans attendre (parce que ça presse à moitié. 'fin ça demi-urge quoi... mouarf) cette sympathique galette, qui après tout n’est pas plus bigarrée qu’un The Spectral Sorrow. Mais si vous en pincez plutôt pour la tambouille Left Hand Path et les fonds de marmite Like an Ever Flowing Stream, préférez quand même les 2 premiers Bloodbath, Stickin Up the Night, voire même le très bon – bien que relativement récent – Midvinterblot d’Unleashed.

photo de Cglaume
le 01/03/2011

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