Howling Sycamore - Seven Pathways To Annihilation

Chronique CD album (52:54)

chronique Howling Sycamore - Seven Pathways To Annihilation

Sur la pochette de son premier album, Howling Sycamore affichait son emblème – un sycomore, donc – brandissant fièrement vers le ciel une absence de feuillage confinant à l’exhibitionnisme. Sur Sevent Pathways To Annihilation, son 2e album, la carcasse de bois laisse cette fois la place à la foudre, équivalent fortement électrifié du vénérable végétal dont les ramifications s’étendent par contre vers le bas. Forte mais ambiguë, l’image s'avère à la fois judicieuse et légèrement trompeuse. "Légèrement trompeuse" parce que la musique de la formation internationale (Jason McMaster / USA / Watchtower, Davide Tiso / Italie / Aborym, Hannes Grossmann / Allemagne / Alkaloid) n’est pas devenue plus électrique, au contraire: la composante Metal extrême aurait plutôt tendance à s’estomper dans les effusions lacrymales. Mais néanmoins "judicieuse" car en effet, il s’est produit comme un retournement de situation: après nous avoir carrément emballés en début d’année dernière avec son acte de naissance discographique, le groupe réussit ici l’exploit malencontreux de nous barber grave. Et de candidat au Top 2018, il passe à favori dans la catégorie Flop 2019...

 

« A ce point? Mais qu’est-ce qui a pu changer autant? Ils se sont mis au Drone sludgy? Ils remixent d’anciens morceaux à la mode Eurodance / musette? Hannes a lâché la double pour programmer une BAR? »

 

Rien de tout cela. Le groupe pratique toujours un Metal progressif tourmenté et recherché, servi avec petits fours et bulles légères. Pas de véritable changement stylistique donc. Côté musiciens pas de bouleversement non plus, y compris en ce qui concerne les featurings puisque Bruce Lamont (Yakuza) hurle toujours du sax sur « Sorcerer » et Kevin Hufnagel (Gorguts) revient lui aussi malmener son manche avec les copains. Et ce ne sont pas les extras de luxe Marty Friedman (oui, ZE Marty) ou Matt Baldwinson (Tangaroa) qu’il faudra blâmer pour ce mauvais bulletin.

 

Le truc c’est que sur son premier album, le groupe ruait dans les brancards, résistait, prouvait qu'il existait: bref, il protestait contre sa triste condition. Il avait l’humeur sombre, certes, mais il blastait et rageait avec vigueur pour ne pas se laisser bouffer, et il le faisait avec ce genre de classe susceptible de séduire le métalleux sensible aux belles choses. Alors que cette fois, l’annihilation dont il est question dans le titre n’est clairement pas celle que peuvent évoquer les musiques de Krisiun ou Angel Corpse: il s’agit plutôt de la réduction en cendres de toute forme de joie de vivre, de cette plongée dans une morne dépression dont on ne sort qu’avec les veines tranchées ou une fois le cocktail de médocs avalé. Et au diapason de l’ambiance générale, l’auditeur s’enfonce dans un triste marasme où tout n’est plus que lamentations tragiques, brumes déprimantes  et accablement irréversible. Par moment tout cela est tellement lourd, tellement pathétique que l’on a l’impression de mater en boucle une scène d’enterrement pluvieux dans un film est-allemand des années 60.

 

Auparavant – il y a à peine plus d’un an – les mélodies vicieuses et les attaques de biais avaient pour cadre des nuits orageuses, des débauches d’énergie mauvaise. Le cœur brûlait de colère, Jason interpellait violemment les dieux, Hannes tonnait avec vigueur. Alors que sur les looooooooongues 7 compos nouvelles, le schéma reste tout le temps le même, les feuilles marronnasses ne cessent jamais de tomber, les mélodies lancinantes nous tirent sans cesse vers le fond, et ce ne sont pas les quelques épisodes blastés / hurlés qui réussissent à secouer durablement la mule, ces regains de vitalité temporaires sonnant bien trop mécaniques, trop systématiques pour qu’on y voit une colère convaincante. Irrémédiablement, morceau après morceau, on se fait donc de plus en plus suer, même si la 2e moitié de « Second Sight » apporte un petit mieux. « Sorcerer » aurait pu lui aussi s’avérer plus convaincant, sa fin dramatique rimant à nouveau (ou presque) avec épique. Sauf que 2 dernières minutes d’un duo piano / cordes acoustiques tristement prétentieux annihilent (… on y revient, tiens) nos espoirs lors d’une dernière pitoyable pirouette.

 

C’est donc uniquement pour tenir compte du bagage technique des Messieurs ici rassemblés, et pour prendre en compte les sensibilités des uns et des autres (paraitrait-il que certains aiment à se vautrer dans leur mal-être) que la note ne tombera pas en-dessous de 5/10…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: autant le Metal extrême sombre et progressif de Howling Sycamore nous avait positivement impressionnés, autant les pleurnicheries à poils mouillés de Seven Pathways To Annihilation nous plombent le moral et nous les brisent menu. Si vous voulez tester un réveil à l’opposé de ce que vous promettent Merinos, Zest Citron et Benco (ah les références de vieux), demandez donc à votre radio-réveil de jouer cet album plutôt que du clairon, vous ne serez pas déçus!

photo de Cglaume
le 24/06/2019

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