Screw You Guys (funk The Nation) - Jungle
Chronique CD album (39:19)
- Style
Fusion groovy - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2015 - écouter via bandcamp
Ça c'est sûr, dénicher des p’tits jeunes qui se râpent la gorge et la corne des doigts sur du Thrash furieux, du Death grognon ou du Post-Stoner/Doomcore barbichu, c’est pas bien compliqué: le robinet à démos / EPs aurait même plutôt tendance à fuir… Par conte quand il s’agit de slapper de la basse et de faire couiner la pédale à disto’ en mode Funky Family, ‘y a plus personne, ou presque! Bah alors quoi: Infectious Grooves ne fait plus rêver la jeunesse? A moins qu’il soit désormais difficile de dégoter un bassiste potable? Heureusement qu’on croise encore parfois la route d’un Toumaï ou d’un Cool Cavemen pour ne pas avoir à systématiquement recourir à la Machine à Voyager dans le Temps pour aller faire ses emplettes de swingueries juteuses!
Tout ça pour vous dire que cela m'a fait bien plaisir de tomber sur Jungle, premier album d'un groupe qui place au même niveau d’importance craquements de nuque et claquements de doigts, accès de rage et pulsations groovy. Car le trip de Screw You Guys, c’est la Fusion qui unit dans son lit non pas les cheveux blonds / les cheveux gris, mais l’inventivité combattive de RATM / le gros Funk Metal qui pulse. Avec, comme de bien entendu, une basse qui fait du trampoline tout contre nos enceintes, et une guitare qui s’éclate à glousser et onduler aux limites du bastion de Tom Morello, le tout en abusant des effets les plus croustillants de sa pédale.
Aaaaaaaah: il est content Rosco!
Sauf que… Arf, travail ingrat du chroniqueur qui ne peut pas ne pas dire ce qu’il pense, même s’il a de la tendresse pour le joli minois qui se tient dans le box des accusés: il va falloir s’attaquer au chapitre des Gloups et autres Bouôrf, avec ce que cela sous-entend de critiques qui passent en travers de la gorge et de vacheries-mais-presque. Parce que la vérité c’est qu’en de trop nombreux moments l’écoute de Jungle donne le sentiment d’entendre l’enregistrement de potes enthousiastes mais pas tout à fait au niveau qui tentent le tout pour le tout en participant à un tremplin local. Peut-être cela est-il dû au fait que certains titres comportent certes des passages tout à fait efficaces, mais que rarement l’assemblage de tous ces éléments aboutit à la création d’une compo solide, plus grande que la somme de ses composantes. Peut-être est-ce dû à l’absence d’un mastering qui ferait sonner le tout plus gros, moins « garage ». Sans doute est-ce dû en bonne partie à Julien, dont le chant est parfois un peu en-dessous du niveau requis pour arpenter les grandes scènes (… il est quand même salement laborieux le refrain de « Never Lost »!). Peut-être est-ce dû à des enchainements ou des parties parfois un peu trop téléphonées, un peu trop cliché? Toujours est-il qu’il manque un petit quelque-chose aux Lyonnais, "petit quelque-chose" de suffisamment conséquent pour que son absence relègue le groupe dans la division d’honneur – du moins dans un premier temps…
Maintenant il y a quand même ici de quoi faire frétiller l’amateur de bonne vieille Fusion à l’ancienne. Notamment sur « Goral Clot », dont le démarrage a le potentiel des gros hits (… sauf que, quand Julien arrive: aïe!). Puis sur les faux airs de Prong époque « Snap Your Fingers… » de « Never Lost ». Sur les bons petits coups d’aiguillons de « Cassowary ». Sur la Funk juteuse de « Step On It » (même remarque que pour « Goral Clot » par contre…). Ou sur le très bon « Pawn », dont la place en queue de peloton atteste de l’intelligence d’un groupe qui – autre preuve – préfère proposer de nombreuses compos courtes que de longs labyrinthes sans fin au sein desquels ils nous auraient (et se seraient) sans aucun doute perdus.
Bref: la loi de la Jungle version Screw You Guys, c’est donc beaucoup de bonnes intentions, du groove, de l’énergie, de la disto Funky, mais des dehors encore un peu trop amateurs. On va donc laisser Baloo élever notre Mowgli lyonnais pendant quelques années de plus, puis on s’en reviendra voir à l’occasion du prochain album si le petit sauvageon a enfin acquis la carrure d'un Tarzan.
La chronique, version courte: vous mélangez Toumaï, Infectious Grooves et RATM… Et pour que le résultat ne déclenche pas une érection trop difficile à cacher derrière le pagne que vous portez en cette Jungle, vous ajoutez de généreuses louches d’approximations et d’amateurisme. Le résultat? Un premier album plein de bonnes intentions et de quelques très bons moments, mais qui demande encore à mâturer un peu…
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