Arkona - Kob'
Chronique CD album
- Style
Post Pagan - Label(s)
Napalm Records - Date de sortie
16 juin 2023 - écouter via bandcamp
Il a fallu cinq ans à Masha Scream, la leader de la formation russe pour composer ce dernier album, aboutissement logique d’une transformation totale sur le fond et la forme débutée en 2014 avec Yav.
La glorification de la Russie ancestrale sur fond de Folk Metal fait désormais partie d’un lointain passé. Kob’ a été forgé en partie dans les traumatismes de la guerre à laquelle la chanteuse est farouchement opposée. Les paroles ont été ainsi écrites de 2018 à 2022 avec la pandémie comme cerise.
Kob’ est alors le reflet de tous les actes ténébreux que l’humanité accomplit par elle-même.
Composé comme une descente progressive dans les abysses, le dernier Arkona n’est pas facile d’accès dans son concept désespéré du destin de l’humanité.
J’ai dû aller chercher une interview de Madame pour bien comprendre le squelette de ce monstre d’album.
"Izrechenie. Nachalo" parle ainsi brièvement de l’ensemble de la plaque, de la façon dont les Hommes ont basculé totalement dans le côté obscur.
Le morceau "Kob'" raconte ensuite comment l’humanité a tiré de la tombe un mal ancien et absolu disparu et oublié depuis longtemps et comment ce mal, a enterré l’Homme lui-même. On est bien encore en terre païenne.
La deuxième étape de la chute de l’Humanité réside dans le fabuleux "Ydi". Il s’agit d’une pièce rituelle totalement habitée avec laquelle les défunts sont accompagnés dans l’au-delà. Toute notre humanité est maintenant morte spirituellement et cette chanson lui dit adieu à jamais.
C’est peut-être dans ce titre qu’on pourra encore repérer des touches de l’ancien Arkona de façon fugace.
"Ugasaya" parle d’un désastre écologique où tous les éléments se soulèvent pour se venger de l’humanité pour tous les tourments et dommages que nous avons infligés à Mère Nature. En fait, la Terre Mère s’est soulevée pour détruire son enfant, l’Humanité.
"Mor" évoque les épidémies qui ont tourmenté l’humanité pendant des siècles.
Puis, l’Homme lui-même a créé artificiellement la peste la plus importante de notre temps.
"Na zakate bagrovogo solntsa" est le morceau le plus personnel de l’unique compositrice du groupe et dans lequel elle exprime son dégoût viscérale pour la guerre.
"Razryvaya plot' ot bezyskhodnosti bytiya" évoque toutes les étapes précédente et se terminent par une catastrophe nucléaire et l’autodestruction de l’Homme en tant qu’espèce vivante.
C’est l'étape finale qui conduira finalement l’humanité dans l’abîme, à travers les conflits armés, les croyances religieuses, les problèmes environnementaux et les maladies.
C’est une annihilation totale.
La huitième piste, "Izrechenie Iskhod" résume l’ensemble de l’album, décrivant la chute, sans espoir, et l’anéantissement du monde.
L'espèce humaine est sortir de l’obscurité primordiale, et il y est retourné.
Sur la forme, c’est le Black et le progressif qui règnent sans partage, emprunts toutefois de touches ritualistes à mille encablures de la folk d’antan.
Kob’ se montre protéiforme et multicouches, immersifs mais surtout d’une noirceur étouffante.
La musique est construite, à l’origine, entièrement sur les guitares. Et ça sent, alors que les différents éléments viennent s’agréger sur ce canevas impénétrable.
Airs occultes, touches d’étonnement (avec ces curieux synthé), atmosphère suicidaire et fulgurance de rage se mélangent pour tisser une toile proche du post-Black.
Je pourrais aussi évoquer très longuement le chant. Si vous connaissez déjà le groupe, sachez que les aspects mélodiques et féminins ne sont qu’un voile éphémère.
Masha sort de toute norme et n'a jamais été autant habitée, aliénée même, par son propos.
La formation russe s’est non seulement affranchie de toutes les codes du genre, mais a également créé l’un des albums de Metal extrême les plus sombres et angoissants de l’année.
Une telle descente aux Enfers ne peut pas constituer un réel chef d’œuvre car il laissera beaucoup de monde sur le bord de son chemin de souffrance.
Il assoit pourtant Arkona au milieu des formations les plus audacieuses et captivantes de notre fin de civilisation.
4 COMMENTAIRES
Pingouins le 18/12/2023 à 12:39:15
Je ne suis pas friand du style mais tu le vends très bien, donc je l'ecouterai en rentrant.
Et l'artwork est très réussi par ailleurs.
el gep le 18/12/2023 à 14:39:54
Ca a l'air chouette, ça, dis-donc !
Moland le 18/12/2023 à 17:55:53
Groupe à voir en live. Charisme de dingue, la Masha.
Crom-Cruach le 18/12/2023 à 18:03:22
Absolument !
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