ASET - Astral Rape

 « ORIGIN : unknown »

Parfois, l’attente autour d’un album est inversement proportionnelle aux informations dont nous disposons à son sujet, en l’occurrence ici concernant ASET à peu près … aucune, si ce n’est que ce projet musical est né de l’esprit et du corps de membres de Seth et d’Oranssi Pazuzu. Un naming trois étoiles n’est-ce pas !!!  Dans un marché extrêmement tendu, où les sorties d’album Black Metal, entre gros noms et projets underground, fleurissent chaque vendredi de la semaine, son label, Les Acteurs de l’Ombre, a-t-il eu raison d’entretenir ce mystère, en nous promettant « une plongée dans l’Astral mystique » nourrie tout au long d’un album-concept « mêlant des rites occultes égyptiens à un Black Metal moderne et agressif » ?

En tout cas, le résultat est là : l’attention des fans du genre et des chroniqueurs est assurée !

Ce premier long-format doit vraiment être approché comme un TOUT, puisque toutes ses étapes, du mix au mastering, en passant par les visuels (j’y reviendrai…), ont été effectuées par les membres d’ASET, se plaçant délibérément en milieu clos en quelque sorte. Avec la ferme volonté de ne surtout pas être réduit à une somme d’individualités, mais à rebours comme une « entité protéiforme », une cellule musicale disposant de plusieurs noyaux.

Le logo d'ASET

Quoi qu’il en soit, si l’ésotérisme égyptien et le mysticisme occulte suintent de chaque pore d’Astral Rape, cela vient d’abord de ses lyrics, dont la substance même est condensée dans ces quelques lignes présentes dans le press kit de Ladlo :

“VOUS QUI DÉSIREZ SAVOIR, LISEZ ATTENTIVEMENT.

ASET ÉTANCHE LA SOIF DE CONNAISSANCE.

SEULE LA BRAVOURE LÈVERA LE RIDEAU ROUGE.

LAISSEZ LE SPHINX VOUS DÉVORER.

VOTRE SANG EST LE VIN QUI ALIMENTE L’EXTASE.

DÉFIEZ L’ASTRAL SUR VOTRE CHEMIN VERS LA DOMINATION.

TEL OSIRIS DÉMEMBRÉ,

TESTEZ VOTRE FOI DANS LA PASSION INFINIE D’ASET.”

Ce concept-album trouve son prolongement classique dans son identité visuelle, d’une grande cohérence avec son logo et ses visuels qui ornent le CD-objet. Avec le regret cependant que les créations laissent apparaître le travail froid de l’intelligence artificielle, alors que tout semblait tourner autour de l’humain ici, autant ses croyances et ses tentations mystiques, que ses mystères et son génie créateur/destructeur. Cela peut paraître sévère, mais on sait bien que, pour d’aucuns, l’artwork est la première étape essentielle de l’approche d’un album. Or, celle-ci a pu d’emblée être obérée par cet usage de l’IA.

IA ou pas IA, telle est (peut-être pas) la question ?

De chaque pore disais-je ? En fait, pas totalement justement… Il est un domaine – et non des moindres – où les influences de l’ésotérisme égyptien sont quasiment absentes et c’est … la musique justement. Planent certes quelques sonorités orientales : les débuts de "A Light In Disguise" ou les incantations de "Abusive Metempsychosis" (3^ème minute) et "Force Majeure". Mais rien de bien franc, en tout cas peu en rapport avec le concept assumé et bien chargé d’Astral Rape. Pour le reste, on a droit à une musique exécutée dans le respect des canons du genre, avec des teintes norvégiennes rassurantes de la fin des années 1990, enrobées d’une prod’ moderne. À l’image des tradi "Serpent Concordat" et "A New Man For A New Age", des titres tous les deux bonifiés par d’excellentes dernières minutes. Il n’est pas inintéressant de noter que, grâce à des informations glanées ici et là auprès de collègues, la plupart des compos dateraient de plus de 10 ans ! Or, le BM européen a bougé durant ce laps de temps ! Le riffing dissonant de "Lord Of Illusions" et de la fin de "Astral Dominancy" me rappellent ainsi tellllllement Misþyrming…  Peut-être alors l’ambiance occulte et mystique a été apposée sur ce long-format bien des années après son écriture.

Mysticisme vs Scepticisme ? Les avis seront sans doute partagés devant ce Astral Rape d’ASET… En fait ils le sont déjà. Je suis désolé d’être demeuré presque insensible à ce projet. Il manque quelque chose à cette création, pourtant assez riche et loin d’être barbante ("Force Majeure"). Peut-être s’agit-il en fait d’un malentendu entre des prolégomènes particulièrement alléchants – le nom, le concept, le logo, le casting – et un résultat final qui est tout sauf désagréable et dénué d’intérêts, mais qui, s’avère en-deçà des attentes légitimement nourries par une annonce plus que prometteuse !

Seisachtheion

le 14/11/2023