Black Sabbath - Sabotage
Chronique Vinyle 12" (43:44)

- Style
Heavy metal - Label(s)
Warner music group - Date de sortie
28 juillet 1975 - Lieu d'enregistrement Studio Morgan Londres & Bruxelles
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Attention, ce qui va suivre n'a rien d'impartial.
S'il me fallait choisir le meilleur album entre tous les premiers Black Sabbath, et déterminer lequel serait le meilleur, je crois que je réfléchirais beaucoup à la question, longtemps, trop longtemps. Mais je pense que je finirais par opter pour celui-ci.
Sabotage est une pièce maîtresse, une démonstration complète, à mettre au même niveau que le House of the holy de Led Zeppelin, tant au niveau musical qu'à celui de l'état d'esprit qui a permis la création de cet album : on note, chez beaucoup de groupes de rock, qu'à la deuxième moitié des années 70 survient une dépression, un trou noir pendant lequel ils se replient tous sur eux, et la plupart du temps à cause de l'excès de drogues. Ce n'est plus la fête, mais une sorte d'after brumeux et sombre dans lequel le cirque de concerts continue tambour battant dans un chapiteau devenu pompeux et ridicule. C'est à cette époque que beaucoup d'artistes ont besoin de faire une rupture.
C'est aussi dans ces sombres moments que beaucoup de ces groupes ont su trouver une émouvante inspiration, et le dernier chant du cygne des années 70, le plus beau et le plus douloureux, avant la chute.
Black Sabbath était alors en rupture d'imagination : l'excès de drogues annihilait toute leur volonté, et ils décidèrent de se faire violence et de se replier dans la vieille Angleterre afin de mieux travailler leur composition. L'album est un long travail de deux ans, fastidieux, mais qui pour moi vaut de l'or.
Ce Sabotage est une apogée. Autant on touche le sublime qu'on a mis tant de temps à atteindre, autant l'avenir annonce des heures sombres de perdition. Le rythme de vie mêlant sex drugs and rock'n roll de l'époque au peace and love indécrottable d'Ozzy se retrouve constamment dans une volonté de destruction, de folie, qui sera bien plus tard vulgairement simplifiée par des brutes à clous qu'on appellera les "metalleux".
Déjà plusieurs petits détails font l'originalité : Pourquoi la cover copie t-elle une œuvre de Magritte ? En inversé, notez, un peu comme si le groupe était déjà passé de l'autre côté du miroir. Pourquoi donc le superbe "Hole in the sky" se termine t-il comme une mémé qui se pète la gueule dans l'escalier ?
Mais plus encore, cet album est un paradoxe entre l'époque folle des années 70 et l'avènement prochain du heavy metal. On pourrait donc découper ce disque en deux, mettant d'un côté les passages groovy, kitsch voire pop, la fin de "Symptom of the Universe", "I am going insane", et bien d'autres passages. D'un autre côté se trouveraient une part très brute, très rock, qui annonce la couleur du cuir.
Musicalement, les riffs sont en or, et la dynamique du groupe ne sera jamais aussi bien utilisée : la voix d'Ozzy ne sera jamais aussi légendaire, nerveuse et désabusée, traînant ses syllabes dans des tempos soutenus, inégalable. L'émotion est à fleur de peau lors du début très Doom de "Megalomania" et le cynisme quant à lui fait place nette sur "I am going insane".
A propos, parlons de ce titre très énigmatique qu'est "I am going insane" : beaucoup disent qu'il s'agirait de la tare de l'album, très pop et fabriquée aux normes des ondes FM. J'aimerais éclaircir ce point : il y a un énorme cynisme qui se dégage de ce morceau, et les riffs d'apparence pop et gentillets cachent des lyrics malsains, mais que la musique, à savoir le show, ordonne de continuer, sans jamais s'arrêter. Cette satire désabusée touchera peut-être plus de personnes après une réécoute plus attentive.
Ce Sabotage relève le blason du Sabbath, par une musique furieuse, annonce de grands changements (nom de dieu, la moitié du morceau "Megalomania" sent, que dis-je, c'est LA poudre qui fait exploser le Heavy metal). L'entité noire affiche ici sa meilleure condition. Le reste qui suivra sera un âge sombre et la perte définitive de cet âge d'or. Adieu.
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6 COMMENTAIRES
l'ogre doux le 17/04/2011 à 14:17:00
A mon sens le meilleur du groupe. Dommage qu'il soit saboté par une des pochettes les plus immondes de la création !
Ukhan Kizmiaz le 17/04/2011 à 18:12:58
Je reste quand même sur Paranoïd même si celui-ci à 2 titres prêts et aussi de classe surnaturelle -^
vkng jzz le 17/04/2011 à 19:31:19
pour moi ça reste exclusivement les 3 premiers, j'ai un blocage
bernard le 18/04/2011 à 14:18:15
Oui il est très bon, mais pas autant que "paranoid" par exemple.
Quant à la pochette je la trouve très reussi au vue d'un titre comme "sabotage"!
Suis je le seul a remarquer que Bill Ward semble de plus en plus discret au fur et a mesure des disques ? Et rien que pour le jeu de batterie, les 2 premiers reste bien meilleurs selon moi.
carcinos le 19/04/2011 à 00:14:43
Peut-être Bernard, mais justement pour moi, Paranoid, c'est bien, mais sabotage ça a une saveur de "survivor" tu vois, on sent que ça a vécu, et que ça s'en sort avec d'autant plus d'expérience.
bernard le 19/04/2011 à 16:27:06
Oui Carcinos je comprend très bien ton point de vue. Je l'aime beaucoup aussi ce disque, je ne faisais que pinailler.
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