BROJOB - A Very Deathcore Christmas : Part 2

Le mois de décembre est arrivé et avec lui l'annuelle promesse indécrottable des fêtes de Noël. Arrivé à l’âge adulte, la magie de l’enfance s'est un peu tarie, avouons le: Noël est devenu aussi synonyme d’obligations familiales,  de discussions passionnées mais pas toujours passionnantes, de cadeaux à trouver de dernière minute, de repas trop copieux...D'ailleurs, vous vous y préparez au fameux "repas du réveillon". Côté digestion et boisson, vous êtes paré, on ne vous la fera plus: Alka Seltzer, des Gavilox (recette maison: deux Gaviscon, 1 Maalox dans du Viandox), du Poo-Pouri pour les toilettes et un rouleau de papier triple épaisseur rien que pour vous en sus dans la valoche.

Côté discussion, depuis un an, vous avez préparé vos meilleurs arguments: Gilets Jaunes, réchauffement climatique, réforme des retraites, développement de l’IA, ordinateur quantique, courbure de la terre, conflit Israelo-Palestinien, marché de l'immobilier français; vous êtes incollable sur tous les sujets clivants et prêt à renvoyer Tonton Jean-Baptiste (ou Jean-Platiste comme on l'appelle) dans les cordes de ses inepties avinées.

Reste la musique et là, en revanche...bah...vous n’êtes pas prêt. Comme tous les ans, la règle est la même: une playlist Spotify familiale créé par Marie-Julie, votre cousine coiffeuse frustrée de n’avoir pu percer dans sa carrière de "Wedding Planner"; une playlist complétée par chaque membre de la famille qui s'en sent l'envie mais en prenant soin de respecter un seul critère sur laquelle Marie-Julie sera intransigeante: la musique devra respecter la thématique "Noël".

Vous la découvrez pour la première fois, la main tremblante, l’oeil aux aguets de toutes les croûtes musicales que l’on vous ressort tous les ans, encore et encore. La liste est longue. Ca commence avec les choix de beau Papa: "Mr. Sandman" de The Chordettes, "Let It Snow" de Sinatra ou encore "Sleigh Ride" des Ronettes. On a vu mieux mais on a vu pire. Ensuite, il y a Émilie, la cousine quinqua, toujours prête à faire la fête et lever le coude au son de "Last Christmas" de Wham ou de "Funky, Funky, Xmas" des New Kids on the Block. Vous refusez d’aller plus loin, trop apeuré à l’idée de tomber sur le trop fameux “All I Want For Christmas" de Maria Carey ou le plus franchouillard "Bons baisers de Fort-de-France" de La Compagnie Créole.

Bref, disons le sans détour: pour cette soirée de Noël 2023, encore une fois, musicalement, vous risquez d’avoir les boules (car oui, vous avez aussi révisé vos blagues de papas et autres calembour foireux souvent suivis d’un "T’as compris? T'as compris?").

Mais CoreAndCo a trouvé la solution qui répondra à l’injonctive musicale familiale ("Il faut que ça parle de Noël, s’il vous plait, merci à tous et belle journée") et à votre éthique musicale personnelle moins polissée mais tout au aussi importante ("faut que ça poutre, bordel de cul!").

CoreAndCo a trouvé la solution car, comme en 2022, les zozos deathcoreux de BroJob ont remis le couvert avec A Very Deathcore Christmas : part 2. Un EP salvateur de reprises de grands classiques de Noël (ou presque), un miracle qui vous offrira 23 minutes de répit bien bourrin au milieu de la sirupeuse playlist familiale.

Pour ceux qui ne connaissent pas, Brojob est le projet trollesque d'Andrew Zink, guitariste talentueux bercé trop fort et trop près d'un mur couvert de posters de Meshuggah, d'After The Burial, de Killswitch Engage et autres cadors estampillés death ou metalcore. Le reste du groupe va et vient au gré de qui était là à la dernière soirée mais pour l'occasion on retrouve le talentueux Paxton Grizzle au micro.

Brojob fait donc le deathcore gras, bas du front, potache, ultra-produit, plutôt technique malgré tout (on est plus proche d'un Rings Of Saturn que d'un Whitechapel), avec du lo(w)l-tuning à gogo, des growls fielleux qui viennent du fin fond de la hotte du gros barbu, des screams un peu à la Cattle Decapitation (le superbe pont de "You're a Mean One, Mr. Grinch"), des grooves ciselés et des arrangements savamment choisis pour enguirlander le tout et lui donner cette petite ambiance cristalline qui sent bon la magie de la "nativité": l’esprit de Noël est bel et bien respecté et le décorum "deathcore" n’a jamais eu autant raison de sentir le sapin.

La production dégouline de gras, on sent que le saucier n'a pas pleuré sur la maïzena donc c'est nourrissant, elle peut se rhabiller au congélo la bûche chocolat-marron au 3 beurres de Tatie Henriette (ou Tatie Diabète comme on l'appelle). Pas subtil mais pour le style, on n'aurait pas pu mieux faire et c'est parfait.

Bref, cette année, il n’y aura pas que la farce de la dinde qui fera la blague. Potache oui mais complètement crédible et travaillé, BroJob a mis les petits plats dans les grands et le menu proposé n'est pas inédit mais est particulièrement original. 50% débile, 50% technique, 100% noël, le deathcore des joyeux lurons de BroJob ne manquera donc pas de sauver Noël cette année, au moins le vôtre. Sans tomber ni dans la reprise des éternels classiques, ni dans la reprise "meeeetoooool" à base de "je rajoute de la disto mais sinon c’est tout pareil", cet EP nous offre généreusement du "qui poutre" mais du "qui sent bon le pain d’épice".

On aime bien: un album trollesque mais complètement crédible pour la playlist familiale de Noël…

On aime moins: …il est fort possible que vous ne soyez plus invité l’année prochaine, l'impossibilité d'afficher sur cette page la note que cet album mérite: 24/12!

8oris

le 20/12/2023