Humanity's Last Breath - Ashen

Chronique mp3 (47:30)

chronique Humanity's Last Breath - Ashen

Si on s’en réfère à la Doomsday Clock, agissant tel un indicateur sérieux de la situation planétaire actuelle plutôt qu’un ultimatum destiné à nourrir les convictions de certains êtres en perdition, nous n’avons rarement été aussi proches d’une catastrophe mondiale. Bon… l’avis d’une dizaine de prix Nobel n’est pas vraiment nécessaire à qui détient un brin de lucidité, mais moi, avec ma vision étriquée d’individu lambda, je restais plutôt optimiste… C’est ça! Lucide sur notre incapacité à avancer main dans la main, mais optimiste! Enfin… ça c’était avant que je pose une oreille sur le dernier Humanity’ s Last Breath… avant que mon fatalisme ne reprenne le dessus… avant de me souvenir qu’un fou, acculé, pourrait à lui seul réduire une partie de notre habitat en une terre calcinée semblable à la pochette d’Ashen

 

Quiconque s’est déjà intéressé aux travaux de Buster Odeholm sait à quel point son univers est lourd et oppressant. Jusqu’ici, seul maître à bord en ce qui concerne l’écriture et la production des albums de Humanity’ s Last Breath, le suédois avait déjà atteint sur Välde (2021) un degré de terreur bien poussé. Conscient des limites de l’élaboration en solo et désireux d’emmener le projet toujours plus loin, le compositeur a, pour ce nouvel opus, échangé ses créations avec son compère de Vildhjarta, Calle Thomér, puis avec le français Thimoté Baqué (No Oath), les laissant libre de les retravailler à leur guise mais conservant évidemment son droit de veto. Confiance, oui… aveugle, faut pas déconner. Les trois animaux naviguant dans la même sphère deathcore et ayant à peu de chose près la même sensibilité musicale, leur collaboration n’a pas révolutionné la bête, qui reste pesante et bien malsaine.

 

Quel que soit le cataclysme qui l’engendrera, le chaos n’aura pas trente-six couleurs. Ashen est un asphyxiant dégradé de noir où chaque piste a sa singularité mais n’est pourtant pas si différente de sa précédente. Une ambiguïté distordue, aux forts accents Djent, entre guitares lancinantes et double chant Gojirien qui, en une fraction de seconde, nous fait passer de la suffocation à la toute-puissance, regardant cette garce de fin du monde droit dans les yeux (« Linger », « Withering », « Shell »). Certaines tracks se distinguent par l’ajout d’un ingrédient spécial, comme l’appel vers le fond des sirènes d’« Instill », le riff lourd et efficace de « Bearer », ou encore la miniscule touche d’espoir apportée par le chant clair de « Passage ». D’autres par leur bonne évolution entre lourdeur et déferlements de blasts (« Catasrophyse », « Death Spiral »), le tout nappé de synthés ou de quelques notes hypnotiques, loin dans le fond (« Lifeless/Deathless », « Labyrinthian »). Mais dans l’ensemble la recette de base ne diffère peu et malgré la variété des dressages, une sensation de déjà-vu peut être ressentie au fil des déclinaisons.

 

Les plus imaginatifs verront en Ashen un nouveau tableau apocalyptique digne des meilleurs romans de SF, les autres, plus terre à terre et au pessimisme accru, ne pourront s’empêcher de faire un parallèle avec notre époque pleine d’espoir. Un album qui séduira facilement un public féru de brutalités modernes mais que les puristes auront assurément plus de mal à ingérer. Difficile de ne pas trouver aux compositions de Buster Odeholm une approche semblable à celle de la musique électronique, due à la déconstruction des thèmes, souvent façonnés à partir d’éléments assez proches. J’en arrive à la déduction évidente que les gars de Humanity’ s Last Breath sont en réalité quatre droides venant du futur, débarqués sur Terre pour nous mettre en garde sur notre sort si nous persévérons dans nos agissements de vils êtres humains…

photo de AdicTo
le 25/09/2023

7 COMMENTAIRES

Pingouins

Pingouins le 25/09/2023 à 10:08:22

Sacré machin que cet album. J'y suis passé pas mal de fois.
Et du coup pour moi HLB c'est comme Vildjharta, je suis bon client potentiellement de ce travail sur les rythmiques et les arrangements bien bizarres et casse-gueule, et il y a plein de choses que j'apprécie chez eux, mais à chaque fois c'est pareil, je me fais vite un peu chier malgré mon appréciation de la maîtrise totale des instrus.
Il me manque le petit point de bascule où on trouve de la rage, de la passion, de la colère, des émotions qu'on te balance à la gueule quoi.
Mais bon, c'est pour ça que je suis assigné au hxc et trucs qui crient affiliés dans ce webzine qui nous sert de bonne maison ahah :).
Chouette chro par ailleurs :)

el gep

el gep le 25/09/2023 à 11:02:59

Pour le côté inhumain, on peut ajouter cette pochette qui aurait pu être générée par une IA (personnages indistincts dans une drôle de brume, couleurs, textures, etc, des trucs beaucoup vus dans les machins chiés par les IA).
Apparemment, ça serait un vrai être derrière, j'ai cherché, Eye Of Saros.
C'est perturbant ces histoires d'IA, ça rendrait presque parano.

AdicTo

AdicTo le 25/09/2023 à 11:29:35

Je suis assez d’accord avec ton analyse. Cet album a un côté impressionnant mais il ne me laissera pas un souvenir impérissable. Et peu de place aux émotions ici oui…

AdicTo

AdicTo le 25/09/2023 à 11:41:24

Le précédent était en réponse à Pingouins :-)

@el gep: yes merci pour la précision, du coup je suis allé faire un tour sur sa page web. Mais c’est vraiment mon ressenti après les multiples écoutes pour cette chronique. On dirait que beaucoup de choses sont « générées » sur cet album.

el gep

el gep le 25/09/2023 à 12:17:08

Il n'est pas impossible non plus que l'artiste lui-même ait utilisé une IA, ceci dit, ahah.

8oris

8oris le 25/09/2023 à 12:27:23

Autant je reconnais la capacité des mecs à produire des albums vraiment uniques, d'avoir su trouvé un son bien à eux et réussi à tirer leur épingle du jeu dans la scène (surchargée?) du Deathcore, autant je trouve leur musique affreusement ennuyeuse et sans aucun relief (la prod édité à grand coup de schlass n'aidant pas). Je serai curieux de voir comment cet album vieillira avec le temps.
Plus ennuyant qu'asphyxiant pour moi mais la chronique, qui donne envie du reste, résonnera assurément pour les fans. ;)

Matt666

Matt666 le 25/09/2023 à 18:54:51

Un peu de mal sur la longueur à passer outre ce sidechain de ouf sur le kick. Vu le pédigrée du bonhomme c'est dommage, mais c'est voulu :)

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