Iron Maiden - Powerslave

Chronique CD album (50:57)

chronique Iron Maiden - Powerslave

"Iron Maiden is the best band on the planet" (Winston Churchill)

 

Nous sommes le 8 décembre 2024 et nous célébrons, à l'instar de ce magazine spécialisé qui lui consacre sa couverture, afin d'attirer le chaland boomer qui achète encore la presse papier et sur la corde sensible et nostalgique duquel il convient de tirer, diront les esprits chagrins, le 40e anniversaire d'un album mythique, véritable pierre angulaire de l'histoire de la musique en général et du heavy metal en particulier, n'en déplaise aux détracteurs qui ne parviennent pas à différencier les publics de Johnny Hallyday et d'Iron Maiden et partant, pensent que la Terre serait plate. Msieudames : Powerslave

 

Nous sommes le 8 décembre 2024 et depuis la veille, le monde se divise en 2 parties : l'une comprenant quelques dizaines de milliers de Brésiliens qui peuvent clamer haut et fort qu'ils ont assisté au tout dernier concert de Nicko McBrain derrière les fûts de la Vierge de Fer, et la seconde qui peut se contenter de vivre l'événement par procuration, à grands renforts de vidéos glanées sur la Toile. 

 

La nouvelle est tombée sur les téléscripteurs quelques heures avant le concert à São Paulo. On aurait pu s'y attendre, au vu des soucis de santé du gaillard (un récent AVC) et de ses difficultés à interpréter ses parties, allant jusqu'à ralentir les tempi des morceaux et zapper certains roulements et autres breaks, comme on a pu le constater lors du passage des Britanniques au Hellfest en 2023. Nonobstant sa courbe de progression au fil des dates de la titanesque Future Past Tour qui mène le groupe aux quatre coins du globe, de l'Australie aux Amériques, en passant par l'Asie avant d'arriver en Europe. On pouvait s'y attendre, et pourtant, publié par le batteur lui-même, le communiqué annonçant son retrait de la tournée nous prend de court, nous sonne, nous signifie qu'on assiste, groggy, à la fin d'une époque. C'est que, pour asséner d'autres chiffres, le bougre accompagne le fan depuis toute une vie : 42 ans qu'il sévit au sein de l'une des plus grandes formations de rock et de metal encore en activité de l'Histoire. 42 : la réponse à toute question. Coïncidence ? Je n'crois pas ! 

 

Adonc, le réflexe consiste à choisir une galette à faire tourner sur la platine pour marquer le coup, pour rendre hommage au boute-en-train de la bande (un peu comme quand on visionne pour la 528e fois Point Break à la mort de Patrick Swayze ou Marche à l'ombre à celle de Michel Blanc), pour le remercier pour les frissons et les larmes de plaisir qu'il a contribué à nous procurer, au fil de ces 42 années, et la logique se porte, parmi les 7 premiers, sur cet album qui fête ses 40 ans. Et puis, si Powerslave se place comme une porte d'entrée parfaite pour tout néophyte qui souhaite découvrir le vaste univers de Maiden (les 2 premiers méfaits gardent cet esprit punk de la fin des 70's et du début des 80's, The Number of the Beast et Piece of Mind défrichent et affinent l'identité du groupe, avec l'installation de schémas qui deviendront typiquement et purement maideniens, Somewhere in Time expérimente et joue l'audace de la recherche du son tandis que 7th Son of a 7th Son joue la carte de l'album concept, avant que les suivants deviennent des patchworks dans lesquels il conviendra d'effectuer un tri pour en extraire les perles), il en constitue également une belle sortie pour celui qui tire sa révérence. 

 

On ne va pas insulter le lecteur en analysant ledit album, on ne parlera pas de sa magnifique pochette bourrée de détails et de références, signée Derek Riggs, ni de la production de Martin Birch, qui confère au son de ce chef d'oeuvre un parfum d'éternité à l'image des pyramides d'Egypte, on laissera ce soin aux fans qui connaissent l'objet jusque dans ses moindres recoins, qui savent que "Rime of the Ancient Mariner" dure exactement 13'39, que si on prête bien l'oreille, le tempo de "Aces High" s'accélère imperceptiblement au fur et à mesure que sa cavalcade aérienne l'envoie dans les nuées trouées par les échanges de tirs entre Spitfire et Messerschmitt emportés par le tourbillon de sa structure symétrique telle qu'on la retrouve dans "Deja Vu" sur l'album suivant : Somewhere in Time. On les laissera s'extasier sur la plastique de la jeune Jennifer Connelly dans le Phenomena de l'esthète italien Dario Argento qui a, comme eux, su apprécier le riff de génie qui construit "Flash of the Blade", pour la bande-son de son film ou encore souligner les harmonies des 3 lignes de grattes à 2'53. Nous venons d'évoquer les titres d'ouverture et de clôture du bijou dont il est question ici, une entrée et une sortie réussies, autant d'indices qui nous assurent la présence d'un chef d'oeuvre. 

 

Entre les 2, Powerslave contient absolument toute la quintessence de la musique d'Iron Maiden. Fureur, vélocité, sens du riffage et de la mélodie, technique non pas démonstrative mais au service des compos, dans un équilibre parfait, variété des ambiances, chansons élevées au rang de classiques ultimes, et pièce maîtresse d'anthologie. Les lignes de basse de Steve Harris ne se contentent pas de galoper à l'envi, elles se chantent, comme sur la partie centrale de la chanson qui donne son nom à l'album. Bruce Dickinson impose sa marque et donne corps aux textes. On adeure "quand il chante 'tables start to burn' et pousse un hurlement comme s'il y avait effectivement des tables en feu". Qui n'a pas acheté et lu la poésie de Samuel Taylor Coleridge, si possible dans sa version originale, après avoir décortiqué les paroles de "Rime of the Ancient Mariner" ? Qui n'a jamais rédigé une rédaction en utilisant des paroles de Maiden pour obtenir un A+ ? "Coleridge est en train de faire du headbanging dans les cieux !" Qui n'a jamais constaté que "2 Minutes to midnight" "spoke to its time, and speaks to this time [...] and is more prophetic than ever" ? Outre le fait qu'il sublime et transcende le riff le plus basique et le plus commun du heavy metal, magnifié par l'apport de la basse, ronronnante, bondissante, dansante, même. De toute façon, "la meilleure partie de ce titre se situe entre 0'00 et 6'10". Qui n'a jamais siffloté les soli de Dave Murray et d'Adrian Smith, à l'unisson ou dialoguant ensemble sans jouer des coudes ?

 

Même les titres en apparence plus faibles s'avèrent en réalité être des diamants finement ciselés et criminellement sous-estimés. Témoins "Back in the village" et son riff d'ouverture entêtant ou "The Duellists" : "Les duellistes en question sont Dave Murray et Adrian Smith pendant la partie instrumentale, et qui en sort vainqueur ? Nous tous !" Notamment à partir de 4'16 là où le duo devient trio dans un élan élégant et mélancolique en diable. "L'une des magies d'Iron Maiden est d'avoir deux guitaristes aussi complémentaires qui n'essaient jamais de jouer le meilleur solo du morceau mais qui sont là pour mériter le morceau. Il est rare d'avoir une telle alchimie". Quant à Nicko McBrain, sans compter parmi les batteurs les plus techniques de la planète, son jeu et ses parties participent activement et de manière inventive et personnelle aux structures au pluriel des compos. Tout comme les autres instruments, on peut aisément chanter ses motifs. Il suffit d'écouter la batterie sur la chanson "Powerslave". Elle interagit, bondit et chante (notamment à 5'02) avec les autres instruments qui, tous, livrent une performance à vous en foutre la chiale. "Ses roulements ressemblent au rugissement d'un lion". Ou encore comment elle constitue l'un des piliers de la section rythmique de "Rime of the Ancient Mariner". 

 

Nous sommes le 7 décembre 2024 et au début du set de l'actuelle tournée, des milliers de voix entonnent la mélodie du riff d'ouverture de "Caught somewhere in time". A la fin dudit set, une dernière photo de famille avec le père Nicko. Les musiciens quittent alors la scène, le laissant seul face au public. Avec le public. Il prend son temps pour le saluer et distribuer ses baguettes. Sans afféterie ni autre manière, il remercie et reçoit les remerciements. Comme d'habitude, en réalité. Le même sourire, la même sincérité, l'éternelle authenticité de l'homme. Ce n'est qu'un au revoir, après tout, il ne disparaît pas, il prend juste sa retraite de la scène. Il reste accessible. D'ailleurs, si vous passez par Fort Lauderdale, au nord de Miami, arrêtez-vous à son steak house. Vous y multipliez désormais vos chances de l'y croiser, et si la bonne providence vous sourit, il vous dira : "Holà, avant de commander votre bidoche, débarrassons-nous de la séance de selfies !" 

 

 

 

Nota bene : toutes les citations sont signées par des commentateurs sur YouTube, celle de Churchill comprise.

photo de Moland Fengkov
le 26/01/2025

2 COMMENTAIRES

Xuaterc

Xuaterc le 26/01/2025 à 12:19:57

Pour être tout à fait exact, la citation complète de Churchill est "Iron Maiden is the best band on the planet, apart Pink Floyd".
 

Moland

Moland le 26/01/2025 à 14:08:04

Sacré Winston. La voix de la sagesse 

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