Le Seul Elément - Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté

Chronique CD album (50:53)

chronique Le Seul Elément - Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté

Le seul élément de Le Seul Elément, c'est Matthieu Pellerin.

 

Vous aurez déjà croisé son nom en ces pages il n'y a pas si longtemps de ça, puisqu'il exerce également dans deux groupes récemment encensés ici, bien qu'officiant en des styles bien différents : Oi Boys et Bishop, dont des membres (Arnaud Ness et Loic Le Goff) viennent aussi lui prêter main forte pour les concerts du Seul Elément, bien qu'il s'agisse à la base de son projet solo.

Vous avez suivi ? Et bien accrochez-vous encore un peu, puisqu'on le retrouve aussi dans Loth, autre groupe qui se trouve par ailleurs être ici invité sur la dernière des cinq pistes qui constituent Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté.

 

Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté, donc, vient naviguer une cinquantaine de minutes dans une ambiance « dark-ambient-noiso-wave », portée en grande partie par des nappes de clavier, néanmoins marquée par endroits par des incursions stylistiques éparses plus proches des accointances de Matthieu Pellerin avec les musiques considérées comme extrêmes. En l'occurrence, ces quelques pistes vocales sur la fin de « Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté », à mi-chemin entre des shrieks black et une interprétation plus noise de la déchirure du larynx, ou encore le final de l'ultime piste (« Maintenir les frontières »), lorsqu'interviennent Loth.

 

Peu de percussions sont présentes pour diriger l'ensemble. Ce sont autour de ces nappes de clavier et des ambiances de piano que sont organisées la plupart des plages de Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté, avec une inspiration que l'on imagine en partie provenir du côté de chez Swans, notamment sur « 00.18 » (avec des touches qui évoquent Soundtrack for the Blind et une voix qui, au moins au début avant que le timbre ne s'en éloigne, rappelle aussi la bande à Gira), ou le retour très réussi des cordes folk sur la seconde moitié de « Danse la nuit ».

 

Si le titre le plus court (et pour lequel une vidéo a été tournée) « La croix, le cimetière » respire comme vous vous en doutez la bonne ambiance, dans un esprit darkwave/goth rock, la pièce finale est aussi la plus longue, du haut de son presque quart d'heure tout rond. Elle est aussi beaucoup plus tendue que toutes les vagues qui sont venues s'échouer dans nos tympans auparavant, beaucoup plus sombre, faite de nappes sonores qui virent au drone menaçant, avec un arrière-plan martelé que l'on sent bien précéder l'effondrement, un rythme de battement de cœur angoissé, et ces effets sur la voix qui accentuent cette impression de menace surnaturelle. On a ici une belle construction dronesque de l'angoisse qui vient buter sur un faux sentiment de finitude, avant une conclusion logique, en rupture mais en parfaite continuité du propos, réalisée avec l'aide de la main experte des invités de Loth. Je n'en dirais pas plus, pour préserver la découverte de cette clôture d'album totalement désespérée. On retrouve ici la qualité d'écriture dans la progression apocalyptique que l'on trouvait chez Bishop.

 

Bref, Le Seul Elément propose une belle escapade sensorielle, suspendue dans le temps, modelée par ses ambiances qui peuvent vraiment emporter pour peu que l'on soit dans les bonnes conditions (à la fois sonores et mentales) pour s'y perdre.

 

Saluons par ailleurs de nouveau le travail de Specific Recordings et de toute la bande qui s'active à Metz pour proposer des sorties de grande qualité dans le domaine varié des musiques sombres. Leur propre commentaire sur ces cinquante minutes me semble être tout à fait adapté : on a ici avec Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté « un disque de dark ambient intense et sincère dont il est difficile de se détacher ». Je ne saurais mieux dire et abonde en ce sens.

 

Signalons aussi le très beau travail réalisé sur la pochette, fort esthétique (illustration de Pierre Weird), malgré une légère coquille de date portée par l'enthousiasme de celles et ceux qui y ont travaillé : le disque est sorti fin janvier 2022, pas en novembre 2021 comme il y est indiqué. Mais ce problème n'en est objectivement pas un et il n'y a aucune raison de leur en vouloir, vu la qualité du contenu. Au contraire, je dirais que cela ajoute du cachet. Disons aussi que si la version vinyle sort avec Specific Recordings, Neutral Records se charge du format cassettes.

 

A écouter avec ce conseil cependant: une fois Juste une idée obscure de ce qu'est la fierté terminé, enchaînez immédiatement avec l'écoute de l'album éponyme de Bishop sorti en octobre dernier. L'ampleur à la fois apocalyptique et fluide de cet enchaînement somme toute logique font apprécier d'autant plus chacun des deux disques.

photo de Pingouins
le 05/03/2022

6 COMMENTAIRES

Xuaterc

Xuaterc le 05/03/2022 à 17:35:05

Bonne ambiance

Pingouins

Pingouins le 05/03/2022 à 17:59:36

✌️

Pingouins

Pingouins le 07/03/2022 à 17:31:16

Zut, personne n'a relevé mon subtil clin d'œil à Proust dans la chronique 😃

el gep

el gep le 07/03/2022 à 17:43:13

Ah ben si, si. Mais on fait pas forcément les malins!

Pingouins

Pingouins le 07/03/2022 à 19:25:15

C'est beau ça, d'avoir la culture discrète :)

el gep

el gep le 07/03/2022 à 19:55:58

Ca dépend des jours, éhéh!

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

  • DEAF RADIO à Mains d'oeuvres à Saint-Ouen le 5 décembre 2024
  • Planet of Zeus + guests au Petit Bain à Paris le 6 mars 2025