Maria W. Horn + Sara Parkman - Funeral Folk

Chronique CD album (42:02)

chronique Maria W. Horn + Sara Parkman - Funeral Folk

Si comme moi, vous placez le live d’Anna Von Hausswolff au Montreux Jazz Festival parmi les meilleurs albums de 2022 (il s’agit de mon AOTY), arrivez par-là. On ne va pas vous servir du lancinant, du rampant, voire du péremptoire, en vrac et au pif, ni une contrefaçon de la grande Circé susmentionnée mais vous en aurez pour votre pesant de mélancolie et d’onirisme avec force superlatifs. A l’instar des cousins irlandais de Lankum qui insufflent une géniale dose de modernité à la musique traditionnelle, Maria W. Horn et Sara Parkman s’associent pour une œuvre qui visite la folk, enrichie d’expérimentations puisant de manière subtile et à peine perceptible leur substrat dans les univers sombres du metal, du drone, du sacré et du profane.

 

Les 2 Suédoises se connaissent depuis l’adolescence et avaient déjà appartenu à une formation rock. La 1e navigue dans une musique électronique expérimentale et avant-gardiste, minimaliste mais viscérale, qui lorgne du côté du metal dans son esprit et de l’univers d’Arvo Pärt (nous vous recommandons chaudement l’album “Epistasis”), tandis que la seconde, violoniste et chanteuse, avance sous l’étendard de la musique folklorique en plongeant dans son héritage chrétien. Elles se retrouvent ici pour une collaboration initialement conçue pour un spectacle de danse créé par Mattias Lech et Lisen Ellard. Résultat : un album qui s’inspire des rites funéraires de leur culture et des chants élégiaques de la Carélie finlandaise et qui propose un voyage pendant lequel le recueillement rencontre la rédemption dans une dynamique hautement cathartique.

 

Si “Funeral folk” s’ouvre sur les lamentations de violons contemplatifs, l’album ne se borne pas à une approche sépulcrale du deuil. Les parties vocales se veulent feutrées, dignes, presque intimistes. Pour mieux caresser l’universel. En 7 minutes, “Evighetens sommar” se déploie comme un silencieux lever de soleil chassant progressivement les brumes et les frimas de la déréliction. Pour mieux glisser vers un début de “Till Margareta” cristallin comme la rosée du matin. C’est là que l’on commence à saisir la magie de “Funeral folk”. L’orchestration se complexifie insidieusement, tandis que de lourds accords distordus viennent marteler les mélopées des violons avant de laisser entrer dans la partition des vocalises à vous en foutre la chiale que ne renierait pas la grande prêtresse Lisa Gerrad de Dead Can Dance.

Dans la musique de Maria W. Horn et de Sara Parkman, les machines, aussi discrètes soient-elles, participent à une danse de sabbat avec les cithares, les vielles à roue, les guitares et autres violons. Le duo utilise ces instruments pour créer une ambiance ambivalente dans laquelle la souffrance engendrée par la perte s’extirpe de l’âme pour mieux se laisser prendre par la main d’une certaine forme de délivrance. Les polyphonies, déchirantes, augustes et saturniennes sur fond de drone abrasif de “Kyrie” qui se prolongent par leur rémanence a capella de “Memento mori” s’entendent comme les voix des vivants et des morts qui se superposent dans une ultime communion. Elles peuvent alors se perdre dans la récollection apaisée du titre de clôture. En nous invitant à expier, à respirer, à espérer.

photo de Moland Fengkov
le 08/04/2023

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