Nami - Fragile Alignments

Chronique CD album (57:04)

chronique Nami - Fragile Alignments

Depuis le temps que les îles Féroé arborent fièrement les vikings locaux de Týr, et que de son côté Monaco se la pète façon "smart evil" avec Godkiller… Même à San Marin, patrie d'Alchimia, on affiche des velléités grind/death, c’est dire! Alors pourquoi Andorre n’aurait pas aussi un groupe dont les poils et les crocs poussent à la pleine lune, hein? Eh bien ça y est: dorénavant, dans les hauteurs principautières aussi ça aligne les growls et les riffs de furieux. La source de tout ce raffut s’appelle Nami, et histoire d'animer un peu les soirées pyrénéennes, le groupe a mis au point un death progressif de toute beauté, à la fois technique et djent-étiquement modifié. Eh non, il n'est pas question ici de petit artisanat métallique local, la preuve: nos lascars ont d’ores-et-déjà atterri dans le panier bien garni de la Klonosphère – dont je ne vous ferai pas l’offense de vous rappeler les hauts faits passés et présents.

 

Une écurie réputée, un digipack à l’artwork classy typé « Grimpe donc sur mon col, j’ai la Grande Ourse en feu », des prétentions techniques avérées, de longues et ambitieuses plages musicales… Et une apparition sur le 3e volume de la compilation Combat Nasal. Diantre, tout cela sent bon la découverte croustillante! Et en effet, l’écoute de l’introductif « Awakening From Lethargy » enfonce bien profondément le clou de l'excitation fiévreuse. Démarrant sur la sereine quiétude d’un petit matin plein de rosée, le morceau s’épanouit progressivement et la fragile délicatesse des débuts laisse bientôt place au lever d’un puissant astre solaire, chaleureux, organique et majestueux comme le Terria d’un Devin Townsend ou les habiles mélanges acoustico-métalliques d'un Opeth. Sauf que dès l’entame de « The Inner Man: Materia », un violent effet de contraste nous fauche l’enthousiasme au niveau des chevilles, et les détours pas toujours judicieux du death revêche qui nous cueille alors nous rappellent que le groupe sort là son tout premier album, et que s’il est plein d’un monstrueux potentiel, il va encore avoir des coups de gomme et des couches de vernis à passer pour faire de ses superbes croquis des chefs d’œuvre à proprement parler.

 

Allez, puisqu’on a déjà flanqué bien franchement le pied dans le côté obscur de cette chro, mettons-y aussi le deuxième et pataugeons-y gaiement comme Mimi Cracra dans les flaques. Le chant tiens: autant le registre clair fait en général preuve de délicatesse et de sensibilité, autant le growl de Roger est court et plat, sans profondeur (la comparaison naturelle avec Mickaël Akerfeldt faisant assez mal de ce point de vue). Autre – et principal – travers: Nami étire ses morceaux tout en longueur, ce qui n’est pas un mal en soi mais qui nécessite une sacrée science de la compo pour faire tenir le tout debout sans que la pression ne retombe, surtout quand on donne aussi abondamment dans le registre « spleen introspectif & clairières ombragées ». Et sur Fragile Alignments, bam, on compte 2 flops de ce point de vue: « Loop of Truth » dont les tentatives d’envolées ne décollent jamais tout à fait (heureusement la fin du morceau est d’un autre tonneau, ce qui efface toute trace d’amertume), et « Conscience Of The Void » qui rajoute pas loin de 9 minutes au déjà très long « Cosmical Beginning », tout en étant bien trop doux et pas assez consistant.

 

Bon là, c’est clair: le père cglaume n’a vraiment pas aimé Fragile Alignments.

 

Tout faux les gars! Ce premier album est assez exceptionnel – si l'on veut bien oublier un instant les points noirs précédemment biactolisés. C’est que le niveau des zicos est sacrément bluffant, ce qui leur permet, outre d’aligner des plans assez excellents, de se balader d'un genre à l'autre, les progueries rêveuses Opethiennes n’étant quand même pas tout dans la vie! Et en effet le groupe s’aventure régulièrement du côté du metal technique, les mélodies de « The Growing – Earth » pouvant rappeler le Death des derniers albums, tandis que la fin de « Loop of Truth » fait rejaillir Atheist de la boîte où il était enfermé. De son côté « Cosmical Beginning », bien qu’un peu long, rend lui aussi un hommage appuyé au techno death des grands anciens, pour le plus grand plaisir des vieux schnocks comme moi. Et si le groupe fait beaucoup dans la saccade saucissonneuse et le croc-en-jambe rythmique, il ne s’en va pas moins badiner par ici dans des plans bien groovy, et par là dans une passe doom-stoner (à 2:16 sur « Oppression and Understanding »). Tiens, parlons-en de « Oppression and Understanding »: bordel que ce morceau multi-facettes est bon. Un (quasi!) sans faute. Que ce soit la rafale de marteau-pilon syncopé qui nous décolle la rétine dès 0:36, l’effet ricochet qui s’ensuit à 1:18, la vieille ruse de renard du stop’n’go qui prolonge le plaisir, les twins magiques qui décollent à 3:14 puis partent fièrement en campagne... BORDEL, on ne débande pas!!! Quand vous rajoutez à cela l’au-revoir mélodique, inspiré et dynamique qu’est « The Pattern » en clôture d’album, vous vous rendez compte qu’il y a en effet ici matière à arborer un beau sourire bien niais d’auditeur contenté.

 

Alors OK, on vous fait souvent le coup: « Un premier album qui n’est pas sans les habituels défauts des débutants mais qui montre un réel potentiel. Le groupe devrait faire parler de lui dès sa prochaine sortie ». Oui mais là, bon dieu que c’est justifié! Sauf que Nami devrait même faire parler de lui dès ce premier jet, sans pour cela avoir à passer la 2nde. Allez les copains: passez-moi ces mornes longueurs à la pierre ponce, travaillez encore un poil vos acquis, ajoutez un peu de gluant et de rauque à vos growleries, et bordel de zob en peau de chou-fleur, vous aurez de quoi faire salement bicher les amateurs de dentelles métalliques qui n'auraient pas encore succombé! En un mot, Fragile Alignments est un premier album namiliorable, certes, mais néanmoins d'ores et déjà nadmirable (...il 'peut pas s’empêcher l’animal!)

 

 

 

La chronique, version courte: un superbe premier album de modern prog-death technique, avec certes quelques défauts mais surtout beaucoup de talent.

photo de Cglaume
le 27/09/2011

2 COMMENTAIRES

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 28/09/2011 à 09:35:30

Me demande à partir de combien de tranches de fromage de tête, t'arrive à nous sortir un "les points noirs précédemment biactolisés"

arf

cglaume

cglaume le 28/09/2011 à 09:45:40

C'est surtout aux sandwiches mortadelle-mozza' que je carbure :))

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