The Hellacopters - Through The Eyes Of...

Il fallait que l’on vous en parle.  Maintenant, pas forcément, quoique depuis l’annonce d’un nouvel album des The Hellacopters, nous avons, enfin Papy Cyril et moi, envie de vous en parler tous les jours de ce groupe. Nous avions d’ailleurs déjà par le passé abordé le sujet dans ce dossier : ici.

Comme pour Bowie (qui sur la majorité de ses albums plaça à chaque fois au minimum 1 reprise d’un groupe), monsieur The Hellacopters, Nicke Andersson peut être considéré comme un passeur. Un messager. Un passionné souhaitant constamment partager, mettre en avant, les groupes ou morceaux qui selon lui mériteraient davantage d’attention. Ce n’est pas pour rien si le dernier The Hellacopters - avant le retour et Eyes Of Oblivion - fut un album entier de reprises de groupes que l’on pouvait considérer comme inconnus jusque-là. Je me permets même de reprendre une déclaration de Nicke de 2008 pour la sortie de l’album :

"If you haven't noticed yet, our new album, 'Head Off', is comprised of songs we didn't write ourselves. But before you scream, 'Oh no, a cover album!,' let's just clear a few things up.

"The idea for this record dates back about two years. We thought it'd be great to record an album of more or less contemporary songs that are too good to be left unheard. We know that the state of rock 'n' roll have seen better days but the fact is that there are shitloads of great bands with equally great songs out there. Guess you just have to dig a little. Songs that could and SHOULD be on the charts all over the world. But as you all know, the world is far from a perfect place. We're not saying that by recording these songs we'll put them on any charts or anything but maybe, just maybe, a few more people will get to know these gems and their origins.

"Anyway, we selected about 50 tunes that we think kick ass and eventually and carefully narrowed 'em down to about 20. We wound up chosing the songs that sounded like they were written for us by us even and ended up with an album that's one hundred percent THE HELLACOPTERS. In other words, it's not a case of 'Hey, we don't have any songs let's just record a bunch of covers and get it over with."

(Source : https://blabbermouth.net/news/the-hellacopters-explain-head-off-album-concept)

(Head Off, 2008)

2 choses par rapport à cette déclaration :

1, pour ceux qui pouvaient, ou peuvent penser à des enregistrements de reprises comme un remplissage face à un défaut de compos originales, lui, Nicke, indiquait dans l’interview publiée ici qu’il avait plus ou moins toujours à peu près 40 démo enregistrées chez lui. Entre les albums d’Imperial State Electric, The Hellacopters, Lucifer et les nombreux singles ou E.P avec toujours des titres hors albums, je le crois.

2, quand il indique choisir des morceaux qui lui semblent écrits et sonnent comme pour les Hellacopters, et que le résultat est 100% The Hellacopters, il n’y a qu’à écouter le dernier 7' sortis cette année. Les deux morceaux s’enchaînent naturellement. Le second pourtant, "Fire In Cairo", est une reprise de The Cure. Je ne connaissais pas l’original et en l’écoutant, incroyable combien elle sonne davantage Hellacopters plutôt que The Cure. Voir elle en sonne pas du tout The Cure. Et il a été la « dénicher ».

("Stay With You"/"Fire in Cairo", 2024)

Hors ce dernier 7' et l’ancien dernier album, Head Off évoqué plus haut, c’est toute l’histoire des The Hellacopters qui est colorée au rythme des reprises, des « « covers ». Et comme pour "Fire In Cairo", elles sont à 90% excellentes. Certaines irons sur les tributes (The Misfits, The Nomads, Roky Erickson), les faces B des singles ou des maxis, les splits E.P ou les versions vinyls des albums. Et comme pour "Fire In Cairo" et The Cure, quand le groupe original est « connu » ce ne sont pas les morceaux « évidents » qui sont repris (par exemples, pour The Misfits ce sera "Bullet", Pour Black Sabbath, "Dirty Women", pour Iggy & The Stooges, "I Got A right", pour les Stones, "Gimme Shelter", même si pour ce dernier c’est davantage le choix du groupe que de la chanson qui peut surprendre).

(Hell on Earth: A Tribute to The Misfits, 2000)

(la version C.D sera agrémentée d'un 3ème titre, "You Left The Water Running" d'Otis Reeding, 2001)

(Split avec The Flamming Sideburns où chaque groupe reprend un morceaux de l'autre. Les deux autres titres des The Hellacopters seront également des reprises, cliquez sur l'image pour en savoir plus par Papy Cyril. 2001)

Dans une interview – de je ne sais plus quelle époque – il était demandé à Andersson ses titres préférés, référence, ou quelle que chose comme ça. Si étrangement "City Slang" du Sonic’s Rendez-vous Band qu’il a maintes fois repris/cité, mis sur la version vinyl de l’album Payin’ The Dues jusqu’à monter un projet, The Solution, avec le chanteur du groupe, n’était pas dans le TOP 1 de 2 titres que je vais ensuite vous citer, le "Search And Destroy" de Iggy & The Stooges par contre lui paraît bien cohérent et moins surprenant (pour le « style » et joué aux BBC Sessions et 1 autre titre du Pop enregistré évoqué plus haut) que le second, à savoir "HELP" des The Beatles. Que ce soit Nicke Andersson ou tout autre musicien même ceux qui growlent (oui on peut en faire un verbe), ils ont eu une enfance et forcément des références de cette époque. Je me rappelle un papier où Jeff Walker de Carcass était trop heureux d’avoir le coffret avec toutes les versions mono des The Beatles. Certes le lien personnel avec le groupe, les goûts forcément variés des musiciens peut être attendu, et l'ambiance Beatles a même pu déjà être ressentie comme l'indique Papy Cyril dans la chronique de Eyes Of Oblivion ou sur le titre "No Sleeping" d'Imperial State Electric (autre groupe de Nicke Andersson), en revanche, et c’est ce qui nous mène à ce papier, le choix d’en faire une reprise lui peut surprendre. Et ce sera le bien connu par nombreux "Eleanor Rigby" des anglais qui ouvrira ce Through The Eyes Of… (The Hellacopters).

Ce 4 titres a d’abord accompagné en tant que second CD la  version « box » de l’album Eyes Of Oblivion, puis est sorti en vinyl 10" indépendamment de l’album. Si ce premier titre surprend par son choix, par contre étrangement ce sera la reprise qui sonnera le moins « The Hellacopters » de leur histoire. Il est peut être possible que sa notoriété et sa familiarité soient ce qui le rende peu attrayant sur le long terme. Mélodie un peu trop connue, rythme un peu trop posé, voilà, je l’ai écouté plusieurs fois, mais aujourd’hui je le zappe fréquemment. Encore plus au regard de la découverte et de la qualité des 3 morceaux qui suivent.

Nous sommes vraiment dans le morceau fait pour les Hellacopters comme il était évoqué plus haut. "Circus", qui a au final certaines similitudes avec "Eleanor Rigby" dans la structure, avec son pré-refrain puis son refrain (double refrain ?), sonne parfait comme le The Hellacopters du moment ; "I Am The Hunted", avec son riff guitare thrash/speed metal, comme le Hellacopters des débuts, celui hyper rapide in your face qui était également toujours présent plus tardivement sur des EP ou face B de singles (comme "It Might Mean Something To You") ; et "I Ain’t No Miracle Worker" comme un The Hellacopters qui a une touche 60's, ou tout du moins plus "ancienne" par la présence/le son du clavier, la retenue sur la première partie du refrain et la guitare du couplet (surtout comparé au précédent titre), de la période Rock & Roll Is Dead voir ici davantage Imperial State Electric. On notera que les textes de ce morceau sont une référence en terme d'écriture, très "à la Bob Dylan", que l'on pourra d'ailleurs rapprocher de "It Ain't Me Babe". Ceux des deux titres qui précèdent sont également de hautes volées. Et c'est ce qui fait de "Circus" et "I Ain’t No Miracle Worker" deux morceaux incroyablement prenants, à cœur, "sing along" compris. ("Faaall, why don't you fall for me now" !)

200% The Hellacopters et à l'interprétation parfaite je ne peux qu'insister sur la qualité des solos/soli guitare de Nicke. De toutes les parties guitare oui bien entendu, mais les solos/solis ont un truc de fou, un touché, un feeling... Qu'il reste proche de la ligne mélodique originale ou qu'il s'en éloigne, c'est toujours réussi, unique, et personnel. On regrettera  à nouveaux Robert "Strings" Dahlqvist deuxième guitare des 'copters décédé en 2017, et également qu'il n'y ait pas de nouvel album des Imperial State Electric, avec Tobias Egge en seconde guitare, car avec ces deux guitaristes l'alchimie était parfaite.

Années, époques, approches, genres musicaux, modes... peu importe, tout peut donc y passer. Comme il le dit en interview sur CoreAndCo, quand on enlève la production et les arrangements, il ne reste qu'une "chanson" (je me souviens de lui reprenant des moqueurs sur les rés-o sociaux à propos du groupe pour qui son groupe ISE allait ouvrir, à savoir Status Quo, en listant les morceaux du groupes qui sont pour lui indispensables, et qu'ils feraient mieux d'aller écouter avant de se moquer, et c'est vrai qu'avec des titres comme "Is There a Better Way", avant de savoir nous sommes des ignorants). La découverte, la qualité des morceaux, de l’interprétation, de la réappropriation, montrent que toutes ces années passées n’ont pas changé Andersson. Et au passage que ce titre "I Ain’t No Miracle Worker" de 1965 par le groupe inconnu The Brogues éclate un titre de The Beatles. Waou. Et puis "Circus" également. Et puis "I Ain’t No Miracle Worker". Et puis "Circus". Et... Bon sang, j'adore ces deux morceaux.

Pas besoin d’en dire davantage, le message est passé.

P.S :

01. "Eleanor Rigby" : The Beatles, 1966
02. "Circus" : String Driven Thing, 1972
03. "I Am The Hunted" : GBH, 1982
04. "I Ain't No Miracle Worker" : The Brogues, 1965
 

P.P.S :

Quand ce n'était pas avec The Hellacopters, il faisait de même avec son autre groupe Imperial State Electric.

(The Hellacopters, un E.P qui regroupe des originaux qui étaient dispersés sur des splits, singles ou compilations, dont une reprise, le "Speedfreak" de Motörhead - issu de l'album Iron Fist - repris pour le tribute Motörheadin' for the North. 1995)

(Imperial State Electric/Dead Lord split, 2018. 23 ans après, avec le titre "Loser", une nouvelle reprise du même album de Motörhead Iron Fist. Le logo sera détourné avec la typographie et les couleurs identiques à celui des anglais.)

R.Savary

le 14/12/2024