The Murder Capital - Gigi's Recovery
Chronique CD album (45:23)
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- Style
Post-Punk-Rock - Label(s)
Human Season - Date de sortie
20 January 2023 - écouter via bandcamp
Quatre années sont passées depuis la première offrande de The Murder Capital : véritable hommage au post-punk sombre et cérémonial de Joy Division, dont l’atmosphère était couverte d’un voile funéraire et traduisait alors le deuil auquel étaient confrontés les musiciens. Sa parution au même moment que le Dogrel de leurs camarades Fontaines D.C. et – dans une moindre mesure – The Talkies de Gilla Band inscrivit Dublin dans le carnet des bonnes adresses de tout bon fan de post-punk déjà meurtri par les Idles, Shame et autres Viagra Boys l’année précédente. Cependant, alors que la bande de Griam Chatten enchaînait les sorties et accusait un troisième album félicité unanimement par la critique, The Murder Capital se mit en retrait de l’actualité musicale afin d’entamer une réflexion sur le successeur de When I Have Fear : le contexte particulier lié à sa création ainsi que refus des musiciens de réitérer l’exercice de style incitèrent les Dublinois à explorer d’autres horizons artistiques.
Barricadés et cernés par les embruns du port de Wexford au sud de l’Irlande, les membres se mirent alors à chipoter à toutes les pédales d’effet et synthétiseurs disponibles sous la main ; et séduits par les possibilités sonores que ces instruments autorisaient, ils prirent contact avec John Congleton – connu notamment pour avoir produit The Earth Is Not A Cold Dead Place de Explosions in the Sky et les albums de Suuns dernièrement. Ce renfort eut pour conséquence de profondément bouleverser le style musical des Irlandais. Ce changement de cap se reflète ainsi à peine la rétine posée sur la pochette de ce Gigi’s Recovery, qui s’éloigne du cimetière pour se toiser d’une ambiance plus colorée mais néanmoins intrigante.
Passée une brève introduction à l'ambiance inquiétante, « Crying » illustre à la perfection les nouveaux traits stylistiques qui identifient cet album : des effets de guitare atmosphériques vêtus de nappes de clavier aériens, une section rythmique qui distille une tension constante, et toujours cette voix solennelle qui - cependant - tend à s’éloigner de celles de Ian Curtis ou Nick Cave (comme ce fut le cas dans When I Have Fear). Mis à part l’entraînant « Return My Head » et l’efficace « Only Good Things » taillés pour les performances live, The Murder Capital drape son post-punk d’un manteau de post-rock sur l’entièreté de ce second effort, offrant ainsi aux Dublinois un son bien plus singulier que précédemment.
Pourtant, malgré cette orientation radicale, la formation conserve cette atmosphère pesante et crépusculaire, à l’image du plombant « The Stars Will Leave Their Stages » (cette descente de gamme à la guitare à de quoi terrasser l'auditoire le plus jovial) et « The Lie Become The Self » à la puissance mélancolique en permanence sur le fil du rasoir. Les titres se dévoilent en terrain de jeu expérimental d’effets sonores insaisissables ; et la performance du batteur Diamuid Brennan est clairement à souligner dans l'élaboration d’une assise rythmique permettant l’épanouissement d'une telle richesse musicale (« A Thousand Lives » et « Gigi’s Recovery »). D’ailleurs, à l’écoute des 12 perles qui composent cet LP, il ne parait pas inutile de rappeler que John Congleton a aussi travailler sur To Be Kind des légendaires Swans ; ce qui n’est peut-être pas étranger à l’incroyable efficacité de ces éléments post-rock et ambiants inattendus dans la musique des Irlandais, mais ô combien excellents.
The Murder Capital s’est extrait du caveau mortifère régi par sa peur, et s'est assis à la terrasse du café adjacent au cimetière ; les litanies s'évanouirent pour ne laisser qu'un regard vide et absent.
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