Thumpasaurus - Thumpaverse

Chronique CD album (39:30)

chronique Thumpasaurus - Thumpaverse

Procrastiner peut s'avérer hautement bénéfique, parfois. Prenez par exemple le Top de fin d’année, que CoreAndCo s'applique à sortir avec quasiment le même retard que ses Hellfest reports. Eh bien ce manque de réactivité par rapport aux zines voisins nous permet d’être carrément moins lacunaires que la concurrence. Farpaitement. La dernière impasse qui vient par exemple d’être évitée in extremis grâce à ce retard à l’allumage, c’est la mention dans ce fameux Top de Thumpaverse, skeud qui a réussi à se glisser à la 6e position de mon palmarès rien-qu’à-moi. Quelle erreur impardonnable pour un site de référence comme le nôtre (bien sûr, voyons !) cela aurait été de faire comme si cet album n’avait jamais existé. Parce que nom d’un vil coyote : les 40 minutes de folie mitonnées pour vous par Thumpasaurus constituent le premier coup de foudre terrassant ayant frappé votre jaune serviteur cette année, ceci alors que les cotillons n’avaient pas encore eu le temps de refroidir. On parle de ce genre d’album qui vous impose d’arrêter séance tenante ce que vous êtes en train de faire, de vous en repaître avidement, puis de saouler votre femme / grand-mère / voisin avec ce don du ciel – tout en sachant pertinemment que ces malheureux interlocuteurs n’en ont rien à carrer. Ce genre de coup de boost qui vous fait rempiler pour au moins 6 mois d'explorations musicales infructueuses sur le Web sans perdre la foi. Ce genre de découverte qui entretient la flamme au napalm, un peu comme le dernier Melted Bodies avant lui…

 

Thumpasaurus ce sont 5 Californiens qui n’en on rien à foutre. Ni du qu’en dira-t-on, ni de ce qui est à la mode, ni de cohérence stylistique. « Fais voir... C’est vachement bon ce son, non ? Allez banco, on le colle sur l’album ! ». Ces deux phrases doivent résumer à peu de choses près la façon dont le groupe fonctionne. Par contre ce ranafoutisme stylistique n’a rien à voir avec un ranafoutisme technique ou qualitatif : le groupe est non seulement extrêmement carré, mais quel que soit le style qu’il aborde – Funk, Rock, Pop, New Wave, Jazz, Punk, Cabaret, souvent mélangés les uns aux autres – il réussit à accoucher de véritables tubes. Pas étonnant, donc, qu’il ait été embarqué dans les valises de Knower et du Louis Cole Big Band sur quelques dates (Genevieve Artadi apparaît d’ailleurs dans la vidéo de « I’m Pissed »). Est-ce la cause ou la conséquence de ce parrainage ? Je ne saurais dire, ne maîtrisant que mal le back catalogue du groupe… Toujours utile que le Louis Cole en question fait partie des références qui reviennent le plus souvent à l’esprit à l’écoute des 12 titres de Thumpaverse, notamment du fait de rythmiques fréquemment frénétiques, ainsi que d’un craquage saxophonique très Clown Core sur la fin de « What Do I Do ».

 

Mais ce rapprochement ne permet de deviner au mieux que 10% de l’univers des thumposaures. Car ils ont tout autant à voir avec Mindless Self Indulgence, Fjokra, Prince, Will Wood (écoutez « End of the Night »), Downtown Brown (sur le complètement marteau – Nawak, disons-le – « Space Barn »), Queen, That Handsome Devil (que j’aurais bien vu interpréter « Talkin’ Bout »), The Turtles (le début de « End of the Night » fait penser à « Happy Together ») ou encore De Staat… La liste semble infinie, d’autant que 1000 autres groupes de moi mal connus mériteraient également de figurer ici, notamment Devo par exemple, ou Zappa – tous deux cités par le groupe. Primus également mériterait d’apparaître ici, tant « Struttin’ » fait penser à leurs morceaux les plus redneck, malgré un piano Rock bien plus proéminent que la basse.

 

Mais le plus important dans tout cela reste évidemment le formidable impact que la grande majorité des morceaux qui forment la tracklist de Thumpaverse ont sur l’auditeur. N’ayant pu m’empêcher jusqu'ici de vous en tartiner des paragraphes, je vais essayer à présent d’être bref, voire elliptique. Ce qui ne pourra m’empêcher de vous dire à quel point « Emotional Pain » est un superbe crescendo aussi tendu que funky, et traversé en son sommet par d’improbables cris de ptérodactyles. Ni de tenter de vous convaincre que « It Doesn’t Matter » est en fait le tube inédit d’un Prince qui aurait trempé sa classe naturelle dans des sonorités légèrement Synthwave. Ni de vous expliquer à quel point « I’m Pissed » est constamment au bord du craquage, tout en restant incroyablement dansant. Il faudra aussi vous avouer que, malgré l’intensité de ce coup de cœur pour les Thumpies et leur leader halluciné et hallucinant (ce Lucas Tamaren est autant acteur que chanteur – on en oublierait sa guitare !), la note attribuée à cette confiserie discographique ne pourra pas dépasser 9/10. Parce qu’à se foutre systématiquement de ce que pense autrui, nos amis ont fini par commettre deux titres moins exaltants : un « High School » potache et limite pénible, ainsi qu’un « Reaching » trop expérimental et planant pour titiller nos corps caverneux…

 

… Mais Thumpaverse pourrait tout aussi bien finir sur un duo JuL / Yvette Horner qu’on n’arriverait pas à le descendre de son piédestal. Les albums dotés d’un tel niveau d’accroche, d’originalité et de pouvoir de séduction sont trop rares, et donc trop précieux : il faut les chérir contre vents et marées !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : Thumpaverse est un concentré d’accroche et de liberté artistique, un patchwork aussi pertinent qu’irrésistible rassemblant une collection de tubes devant autant à Louis Cole, Fjokra, Mindless Self Indulgence, Queen, Primus qu’à Prince. On ne pouvait rêver coup de cœur plus merveilleusement foudroyant pour bien démarrer l’année !

photo de Cglaume
le 24/01/2022

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