Truie - Ménophilie

Chronique CD album (31:36)

chronique Truie - Ménophilie

Comme pour le dernier Gronibard, on ne peut pas dire que ça a été la bousculade dans la team pour chroniquer le dernier album de Truie. Avec son titre ambiance Blood Sugar Sex and magic version "death grind" et sa pochette style "Confiture, Bon-ne Milf, c’est vrai-ment toi que je kiffe", ça part dans l'équivoque avant même de titiller le bouton Play. Il faut dire que le duo franco-zinzin nous avait déjà prévenus avec Gokkun, son EP sorti en 2019…Ménophilie sera donc le genre d’albums dont la chronique sera à éloigner de vos jeunes têtes blondes dont la connaissance de la bagatelle se résume à une histoire de choux et de rose, parce qu’on ne va clairement pas parler de botanique dans les lignes qui suivent...

Truie fait dans le porn death grind potache (ou vice versa) et je vais enfoncer mon clou avec une signalétique adaptée.

 

Fichier:Categorie 4 CSA.svg — Wikipédia

C'est bon? Il ne reste que les adultes...Alors, c'est parti mon zizi!

 

Pour commencer, je vais me mettre à poil : je connais un petit peu l’un des zozos qui se cachent derrière cette aventure musicale cochonne. Je ne vais pas rentrer dans les détails et résumerais en cette simple phrase "Foutre, que le monde de la musique est petit.". Cependant, quand j’ai expliqué au pépère mon cas de conscience, sa réponse a été sans appel : "Vas-y, défonce-nous!". Je suis allé chercher mon pot de "LubAndCo" par précaution mais finalement, pas besoin de lui préparer les orifices car cet album: c’est l’autoroute.

 

Réduire Truie à la seule étiquette "death porn grind potache" me semble bien réducteur. On retrouve évidemment les gimmicks du style: chants growlés, riffing rentre dedans (par devant et par derrière), groove bas du slip et surtout une banque de samples et de répliques braquemardesque: aussi pléthorique que fantastique. Il y a profusion de perles et s’amuser à retrouver les différentes références, leurs origines pourrait presque devenir un jeu pour l'apéro. Bref, coupons net aux dubitatifs qui tapent dans le fond: oui, Truie parle de cul avec un grand Q. Alors, oui, vous trouverez dans Ménophilie, l’intégralité du champ sémantique du sexe et de ses sobriquets, dans des versions imagées, vulgaires pour certains, drôles pour d'autres. Vous entendrez entre autres les dessous terrifiants d’une scène porno tournée par Lhermite (Philippe, pas Thierry), les déclarations hallucinantes d’une sexo-influenceuse fan d'oignonnade à la crème, un mode d’emploi assez sommaire (mais utile) pour faire les bébés. Le groupe assume (le premier single est sobrement intitulé Pute) et en joue parfaitement dans son plan de communication. Alors, oui, je trouve ce concept drôle, intéressant et original. Pardon!

Drôle sûrement parce que je suis un enfant des années 80 qui a connu une époque où une femme se dénudant à 20h en direct tous les samedis soirs ne choquait personne, un enfant biberoné aux pubs ultra sexualisées (que ce soit avec des hommes ou avec des femmes) et pour qui le sexe est avant tout un sujet qui revêt une dimension non seulement potache mais intéressante. Je vous fais grâce de vous expliquer dans un long et inintéressant texte l'intérêt des Porn Studies dans le monde de la recherche en sociologie mais, bref, n’étant probablement pas complètement déconstruit, je trouve que l’exutoire, l'oratoire textuel et sexuel proposés par Truie ne manquent pas d’un certain intérêt.

Original parce que le propos l’est plutôt et reconnaissons leur au moins ça: voilà qui nous change des groupes qui parlent de la mort, de la guerre, de la SF et autres fantaisies du décorum “metal” classique. D’autant que Truie, à la différence de ces groupes qui font dans la surenchère du calembourg Kronenbourg en mode “prout caca bite chatte”, est ici, au delà des samples rigolo, bien plus subtil. Il y a des textes, avec plus de 30 mots et ils ont beau parler de ce sujet qui choque de plus en plus en 2023 dans notre pays mais ils sont loin d’être anodins et beubeu.

Un exemple:

Corps dénudés, de cuir enlacés.

Tétons gonflés et scrotums fripés.

Dans un ultime cri, bientôt réunis.

 

Un autre:

De mots doux je te couvre,

De caresses, tendresse.

Laisse glisser mes doigts

Pour t´ouvrir les fesses.

 

Apolinaire ne s’en retournerait pas dans sa tombe, pas plus que Greg Centauro. D’ailleurs, on regretterait presque que le style vocal empêche parfois de saisir pleinement les paroles. Autant Kaan ne manque ni de puissance, ni de registre mais sa voix n'est pas toujours suffisamment intelligible.

 

Côté musique, réduire Truie à la seule étiquette "death porn grind potache" me semble encore une fois bien réducteur car celle-ci évolue plutôt dans un death un peu brutal, un peu mélo, un peu moderne et surtout superbement bien branlé (à ce titre, la fin de "Bite En Cage" a un potentiel live assez dingue). Il n’y a pas cette impression de "vite fait", très "à cru" que peut avoir le grind. Ici, la musique, les arrangements, les structures, la track-list, tout est travaillé, peaufiné, affiné. Des préliminaires à la douche post-coïtale, la passe se fait en mode GFE et l'orgasme n'est pas loin. Si on ajoute à cela que les morceaux sont épicés de nappes d’électro ultra efficaces (et qui changent), que l’album a une intro (absolument pas inutile et pas feignasse pour une fois), que le duo se frottent à des styles surprenants ("O Sultan Impuissant" et son approche quasi prog, divinement orientales, le prologue et son petit côté black sympho), on se retrouve avec un duo qui fait un peu plus que "death porn grind". Les riffs ne vont pas vous retourner la gueule niveau originalité, c’est du classique mais du classique hyper efficace, propre comme Le Cupidon un jour férié, et mis en oeuvre avec au moins du sérieux, au mieux du talent. Rien n’est plat, rien n’est ennuyeux, l’approche est variée. Non sérieux, ça bute.

 

Côté production, réduire Truie à la seule étiquette "death porn grind potache" me semble une dernière fois bien réducteur. On est clairement pas sur de l’amateur torché vite fait et qui sent le fond de préservatif oublié sous le plumard. Ménophilie sonne couillu comme un bouc en pleine parade nuptiale. Mixé par le studio Notos (qui est géré par l’un des deux zozos du groupe), le son est solide, plutôt fat mais n’a pas ce côté “too much” des grosses prod américaines. Même s’il manque parfois un peu de brillance (il faut dire qu'avec l'âge, l'audition, c'est comme le sexe: on perd en fréquence), le grain des guitares est superbe, bien croustichatte, et encore plus quand on pousse le volume.

Enfin, l’équilibre est parfait même sur les parties très denses et le résultat final n’est jamais fatiguant.

 

 

Truie, c’est l’histoire de deux mecs qui voulaient absolument faire du death porn grind mais qui sont bien trop sérieux et doués pour le faire comme une seule et simple blague potache (même s’il paraît que ce projet a commencé comme ça à la base). En résulte, Ménophilie, un album qui partouze avec bien des qualités: solide, riche, unique, soigné. Si la thématique en choquera certains, ceux qui seront capables de passer au-dessus découvriront un groupe dont le propos musical ne manque ni d’intérêt ni d’originalité et qu’il est délivré avec un soin tout particulier. Avec Ménophilie, Truie est au death metal ce que Frédéric Dard a été à la litterature avec San Antonio: une preuve que l’art peut tout à fait être au niveau de la ceinture tout en restant fier et superbe.

 

On aime bien: du death porn grind potache mais vraiment pas que, la thématique et la façon dont elle est abordée, le souci de détail et du travail bien fait, les samples incroyables

On aime moins: un chant hyper solide mais pas assez intelligible et c'est particulièrement dommage.

photo de 8oris
le 07/06/2023

10 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 07/06/2023 à 08:30:05

« Confiture, Bon-ne Milf, c’est vrai-ment toi que je kiffe »

🤣🤣🤣

Black Comedon

Black Comedon le 07/06/2023 à 08:39:34

J'ai beaucoup aimé, musicalement ça fait bien le boulot. Mais le registre Porn - Prout bride la réécoutabilité et c'est bien dommage !

cglaume

cglaume le 07/06/2023 à 10:17:21

La référence à Frédéric Dard est sans doute le compliment le plus sympa que tu pouvais leur faire dans ce contexte thématique !!

Black Comedon

Black Comedon le 07/06/2023 à 10:44:45

Je me sens bête d'un coup, j'ai jamais lu San Antonio ☺😁

8oris

8oris le 07/06/2023 à 11:24:51

@black Comédon: Il n'est pas trop tard pour remédier à cela, les S-A sont parfaits pour la plage! :D

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 07/06/2023 à 17:25:17

L'intro du morceau 3 est comme ac ! 

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 07/06/2023 à 17:28:36

C'est con mais cet album m'a collé un sourire idiot et ravi sur les babines.

8oris

8oris le 07/06/2023 à 17:57:00

Ahhh, ça fait plaisir!

dayedayedaye

dayedayedaye le 08/06/2023 à 10:07:00

"hello la team , comme tous les lundis ..." 😂 
Moi perso j'ai adoré l'album et il tourne souvent dans mon casque ( il ma fait prend un fou rire a l'entrainement quand même ) 
Merci pour la super chronique !

Bukake Lover

Bukake Lover le 08/06/2023 à 10:19:55

fouette chro, pour un album lefé, on fent la pafion, du jus à revendre !

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