While She Sleeps - self hell
Chronique CD album (45:04)

- Style
Metalcore mélod(ramat)ique - Label(s)
Spinefarm Records - Date de sortie
29 mars 2024 - Lieu d'enregistrement Fait maison
- écouter via bandcamp
Malgré toutes nos réticences, on a tous un vilain petit canard niché parmi les genres qu’on se plaît habituellement à abhorrer. Mais si, tu sais : ce goût musical un peu honteux, qui te badigeonne la gorge de protestations lorsque tu entends ses premières mesures crachées par la JBL de la soirée histoire de te donner la contenance nécessaire à ne pas montrer le petit kif bien tapi au fond de ta caboche de gros élitiste. Allez, vous mentez pas, on l’est tous un peu. En ce qui me concerne, et ce sans la moindre volonté de le dissimuler, je hisse While She Sleeps au top ouane de mes groupes de metalcore chéris. Une bande de Brittish qui se sont faits tous seuls à base de tracks entraînantes rehaussées de mélodies punchy à souhait, que demande le peuple franchement ? « Our Legacy » et « Civil Isolation » occupent encore aujourd’hui une place privilégiée dans ma playlist, je ne vous dis que ça.
Une belle aventure ponctuée d’une régularité presque métronomique dans la qualité de leurs sorties. Avec une légère perte de caractère sur So What?, je ne la voyais programmée que pour un retour tout en puissance sur SLEEPS SOCIETY (oui oui avec les caps locks ; While She Sleeps ils ont la gueulante plutôt facile, faut vous y faire), sorte de quintessence de toute l’énergie déployable par ces sympathiques buveurs de thé. On peut donc leur faire confiance : en matière de jardinage, à peu près certain qu’ils savent qu’un bon terreau ne dure jamais si l’on veut conserver tout l’éclat de sa jolie petite fleur.
Un bon point pour eux en l’occurrence : de samples électroniques plus appuyés qu’à l’accoutumée en rythmiques pop bien marquées sur les refrains, on peut dire que SELF HELL surprend à la première oreille. On navigue en terrain connu, mais reminé entretemps, bardé d’expérimentations et de fanfreluches rutilantes mais pour le moins douteuses. Si les chœurs si chers à WSS ne manquent pas de leur peps habituel, leur ton se fait infiniment plus lénifiant car largement moins dynamique. Autre déception d’ordre vocale née de ce constat : Loz Taylor aime les carottes et le fromage. Pour autant, on ne peut pas vraiment dire que le chant rappé lui siée à merveille (et merde, même la qualité de mes blagues prend la mesure de ma déception…) Symptomatique de ce virage : de refrains mous en mélodies d’une neutralité assommante, « LEAVE ME ALONE », pourtant parmi les morceaux phares de l’album, ne transmet pas plus d’émotion qu’un coup de gueule de Cyril Hanouna.
Et encore, ce ne sont même pas les problèmes les plus perturbants dans l'alchimie du skeud. La perte totale de hargne ressentie sur les parties vocales de SELF HELL, là encore ça pourrait sans problème passer pour un changement de cap sur les intentions inhérentes au propos de WSS. Difficile, pourtant, de se raccrocher à cette idée lorsque, pour soigné que s'avère leur mastering, leurs expérimentations électroniques parasitent à l’extrême toute l’intensité des parties metallisées d’une majorité des morceaux (« DOPESICK », pour ne citer que lui, et uniquement pour la qualité de son solo par rapport au reste de la galette). Comme quoi, convertir la casse de sa tracklist en caps lock, ça ne fait pas toute la différence. Au contraire, une flopée de ballades bâclées et parsemées de samples drum’n’bass invasifs (« NO FEELING IS FINAL » ou « OUT OF THE BLUE ») laissent craindre un calme ne présageant pas la tempête pour l’avenir.
Pour sauver un peu les meubles, ne reste plus qu’à apprécier autant que faire se peut pas plus de trois-quatre mélodies assez entraînantes, encadrées d’un vestige informe de la vraie gueulante pleine de pétulance à laquelle WSS nous a habitués (pas davantage que « RAINBOWS », « DOWN » et un peu « ENEMY MENTALITY », mais juste un peu). Le reste ne parvient qu’à convaincre du douloureux glissement de la bande à Loz Taylor dans les méandres d’un metalcore geignard pour festivaliers sous kétamine : amorphe et impersonnel (« TO THE FLOWERS » et « OUT OF THE BLUE », je vous lorgne d’un rictus sardonique).
Donc je résume : de son statut de meilleur groupe de metalcore de la décennie 2010, du fait de tout le punch que lui conféraient une originalité et une énergie à l’abri de toute concurrence, While She Sleeps s’est finalement engoncé dans une forme appauvrie de son style pour se fondre dans la masse des groupes anecdotiques du genre ?
Bah moi je le dis banco : ça fait chier.
2 COMMENTAIRES
Pingouins le 02/05/2024 à 15:46:18
Le chant carotte fromage rappé, c'est 👌
Tout ce qu'on attend d'une chronique musicale ici, je valide à 100% 😃
Aldorus Berthier le 03/05/2024 à 00:43:42
Et encore je comptais ajouter le gingembre, mais pas sûr que la pratique soit aussi répandue 😶
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