Xavier Boscher - Embryogenesis
Chronique CD album (1:09:07)
- Style
Modern Prog instrumental - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2017 - écouter via bandcamp
L’un des intérêts nombreux à venir causer musique sur « la place publique » (elle a bien changé celle-là avec ses smileys et ses pubs « enlarge your penis »! Ils sont où le clocher et le bar à Mimile?), c’est qu’on reçoit parfois des albums qu’on n’aurait jamais écoutés si l’on avait dû se contenter de ce que nos goûts et notre portefeuille nous suggèrent instinctivement. Bon, c’est vrai qu’on finit quand même par filtrer ce que le cyber-facteur nous livre, sinon on ne s’en sortirait pas. Mais de temps en temps, au milieu des Flying V patchées, des pentacles growleurs et des cabrioles Nawak, allez, on laisse passer une galette dont on espère qu’elle nous ouvrira de nouveaux horizons. C’est comme ça que je me suis retrouvé à chroniquer Embryogenesis, Nième (10e? A vérifier) album de Xavier Boscher, artiste manifestement très prolifique. Pourquoi celui-ci et pas un autre? Parce que c’était le bon moment, que la pochette flatte l’œil, que Brett Caldas-Lima (Kalisiaaaaaaa!) et Jean-Jacques Moréac (Misanthrope) sont listés parmi les contributeurs (respectivement pour le mastering et un featuring), et que le monsieur pratique un Metal prog moderne et chaleureux qui m’a évoqué Devin Townsend lors de la première écoute-test.
** Coup d’œil à gauche, sous la pochette... **
« Dis: ça sentirait pas la déconvenue en fin de compte? »
Arf… Disons qu’un tel album va trouver son public, mais que ça va être un peu plus compliqué que prévu pour les fans du Dev’ qui auraient découvert le Canadien avec SYL. Parce que, pour faire court et brutal, le Prog instrumental proposé sur Embryogenesis est bien trop aseptisé, bienveillant, raisonnable et sucré pour satisfaire cette catégorie de métalleux pas forcément minoritaires qui restent attachés à l’abrasivité, aux poils mouillés à la bière et aux rictus mauvais. Ceux-ci – ainsi qu’une partie importante du Conseil d’Administration qui siège dans ma caboche – diront que ledit album ne propose rien d’autre que du « Scout Metal », que c’est la musique idéale pour un réveil tranquille en milieu hospitalier, ou encore que c’est le générique de fin rêvé pour le jeu « Zelda VII: My Little Pony Quest ».
Peu de qualificatifs vraiment mélioratifs dans tout ça, c’est vrai…
Pour revenir à une description plus objective de la musique de Xavier, Embryogenesis propose 9 titres instrumentaux d’un Prog moderne (mais sans trace de Djent) lumineux plein d’épaisses nappes de synthé, de couches de guitares éthérées qui riffent au plus haut des cieux, d’orchestrations classisantes et d’effets Electro soft. C’est parfois frais (« Cells », « Cornucopia » et ses quelques touches de chant exotique), parfois enjoué (« Blastocyst »), et globalement serein, caressant, réconfortant… "Indolore" et "lénifiant" pourrait-on également écrire, en revenant au ton du paragraphe précédent. A noter que contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, si l’on excepte les arrangements fastueux et l’extrême densité de l’environnement sonore (vous savez, cette épaisse brume scintillante et tiède typique des prod Townsendiennes), Mr Boscher n’en fait nullement des caisses: ici les instruments sont au service de la musique, des mélodies et du thème (celui de la formation de l’embryon au fin fond des recoins de sa maman). Et puis bon, soyons honnête: certaines mélodies sont vraiment belles, et il est agréable de se laisser un peu aller, la tête passée par la fenêtre de la voiture, à l’agréable brise tiède que nous souffle l’artiste.
... Sauf que les morceaux sont souvent trop longs (ouch les presque vingt minutes du répétitif morceau-titre!), que les orchestrations qui se voudraient grandioses sont parfois trop cheap et synthétiques (ce qui fait alors ressortir le côté « one-man-band tout seul dans mon salon » de l’œuvre), et qu’au final c’est trop souvent une « gentillesse » confinant à la mièvrerie qui ressort de ces compos généreusement recouvertes de crème.
Alors si vous êtes un amateur de Metal progressif qui n’aimez pas être brusqué, qui appréciez les vastes cathédrales sonores de lumière et de coton, qui n’êtes pas réfractaire aux sonorités synthétiques et qui ne placez pas le son live incroyablement plus haut dans votre cœur que les nerderies studio, vous allez trouver chez Xavier Boscher un formidable compagnon de route. Si ce n’est pas le cas mais que vous êtes amateur de Devin Townsend, il y a encore de bonnes chances qu’Embryogenesis puisse vous plaire. Par contre si vous ne rentrez toujours pas dans ces cases et qu’en plus vous arborez un T-shirt « Fistfucking God’s Creation », ça va commencer à devenir TRES compliqué…
La chronique, version courte: « Au pays, de Xavier, comme dans tous les pays, on s’amuse on pleure on rit, il y a des méchants et des gentils… ». Quoique le Prog instrumental sucré offert sur Embryogenesis ne laisse pas beaucoup de méchants et de larmes à entendre. C’est surtout un monde hyper aseptisé calqué sur celui de Devin Townsend, mais avec des décors plus cheap, et peu d'instants de folie. Du coup c’est certes assez bien fait, mais ça ne plaira pas à tout le monde…
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